CORNELL UNIVERSITY LIBRARY *.s.'!!9ll University Ubrary ^"'iiiniiiiii;?ilJlS.,S^S!denteMes ou subjec Cornell University Library The original of tliis book is in tine Cornell University Library. There are no known copyright restrictions in the United States on the use of the text. http://www.archive.org/details/cu31924024829990 SUR LES COULEURS ACCIDENTELLES OU SUBJECTIVES; M. J. 1?>LA.1^JRAU, MKMBllK UK l.'ACAI)ftM[K HU"yAI.K UK BKMl ig U K. BRUXELLES, F. IIAYEZ, IMPHIMEDH RE l/AfiAnESIIF. IIOVAI-E l)K HE1-«IQIIE. 1875 Extrait des Bulletins de I* Academic royale de Belgique, 2m« ser, t. XXXIX, no i ; Janvier 187S. SUR LES COULEURS ACCIDEINTELLES OU SUBJECTIVES. Tous les physiciens et les physiologistes qui se sont occupes des phenomenes subjectifs de la vision, ont r^pete, et j'aj fait comme eux, que la teinte de I'image acciden- telle qui succede a la conleraplalion prolongee d'un objel colore, est loujours complementaire de cclle de cet objet; or ce principe est loin d'etre exact, ainsi qu'on va le voir. II est bien ^labli aujourd'bui que le. bleu pur et le jaune sont complementaires I'un de I'autre; si done le principe generaiement admis etait vrai, ii faudrait que la contem- plation prolongee du bleu donnat toujours lieu a une image accidentelie jaune, et vice versa; mais si Ton examine les differenls ecrits sur la matiere, on constate que c'est la plutdt I'exception : sur quatorze auteurs que j'ai consult^, je n'en ai trouv6 que deux, savoir De Godart el M. Heim- holtz, qui indiquent le jaune comme couleur accidentelie provoquee par le bleu; neuf aulres, savoir Scherffer, Dar- win , Himly, Miiller, Gergonne, Brewster, Newcomb, Auberl eiScheffler, signalent nettement I'orang^; suivant Buffon, c'est un rouge pale. Quant a la teinte de I'image accidentelie qui succede k la contemplation du jaune, c'est le bleu pour Buffon, Scherffer, Brewster et M. Helm- (4.) hollz; mais pour Darwin, Himly, Miiller, Gergonne, Fech- ner, Szokalski et Scheffler, c'est le violet. On ne peut supposer que tous ceux de ces auteurs dont les observations s'ecartent du principe adopte, ont pris le jaune pour de i'orang6 et ie bleu pour du violet; d'ailieurs moi-mfime, iorsque je jouissais du plein usage de mes yeux, j'ai toujours vu, apres avoir regarde fixement un objet bleu, une image accidenlelleorangee, et non jaune; et, apres avoir regarde du jaune, une image violette., et non bleue. Enfin , j'ai fait faire recemmenl les experiences par six personnes, savoir M. Duprez, mon fils Felix, mon gendre Van der Mensbrugghe, ma femme, ma fille et ma belle-fille, et il faut remarquer que les dames, habituees a choisir et k assortir des etoffes , sonl de bons juges en ma- tiere de couleurs : un petit carr^ de soie d'un bleu que toutes ces personnes dcclaraient parfaitemeut pur, et au milieu duquel (^tait marque un point noir, a ^te plac6 sur une feuille de papier blanc bien eclairee par la simple lumiere du jour; le carre avait environ 3 centimetres de c6te; la personne regardait fixement le point noir pen- dant 30" k 40", puis dirigeait les yeux sur une autre partie du papier blanc, pour observer la teinte de Timage subjec- tive. M. Duprez a vu du jaune; mais mon fils a vu un jaune tirant forteraent sur I'orange, ma femme une teinte qu'elle a designee par les mots : couleur abricot, ce qui est une sorte d'orange, et les trois autres personnes de I'orange decide. On a substitue au carr6 de soie bleue un carre de papierpeint en jaune puraumoyendu chromatede plomb; alors M. Duprez a vu du bleu, mon fils et ma belle-fille du bleu Ires-legerement violac^, et toutes les autres personnes nettement du violet. ]l est cons^quemment impossible de conserver le prin- cipe qui attribue toujours a I'imageaccidentelle une teinte ( s ) com-pilenientaire'de celle de I'objel contempl6; cela depend des yeux de I'observateur, el les cas ou le principe est satisfait constituent pluldt I'exception que la regie, du moins en ce qui concerne le bleu et le jaune. Je saisis celle occasion pourrevenir surl'explication du ph^nomene des, couleurs accidentelles. J'ai publie(l),on le sait, une theorie consistant essentiellement dans les propositions suivantes : 1° Pendant la conlemplalion d'un objet colore, laretine exerce une reaction croissante contre faction de la lumiere qui la frappe, et tend a se constituer dans un etat oppose. Consequemment, apres la disparition de I' objet, elle prend spontanement cet etat oppose , d'oii resulte la sensation de la teinte accidentelle, puis elle revient an repos en deter- minant, dans I'impression, une sorte d'etat oscillatoire en vertu duquel cette impression tend a passer alternativement de la teinte accidentelle a la teinte primitive, et vice versa. 11 en est de I'etat physiologique de la retine apres faction prolongee de la lumiere, a peu pres comme de I'etat d'un corps qui, ecarle d' une position d'equilibre stable, puis aban- donne a lui-meme , revient au repos par une suite d'oscil- lalions decroissantes. 2° Des phenomenes analogues ont lieu suivant I'espace : pendant qti'une portion de la retine est soumise a faction d'une lumiere coloree , les portions environnantes se con- (1) Essai d'une Iheorie generate comprenanl I'ensemble des appa- rettces visuelles , ete. (Mem. de l'Acad. de Belgiqde, t. VIII, ISSi). Dans ce Memoire, je n'ai developpe qu'une pSrlie de ma Iheorie, celle qui concerne les phenomenes de succession ; mais j'avais expose , en 1 835 , I'autre parlie avec des details sufiisants, dans un article intitule : S«r les couleurs accidentelles, et inserelau supplement au Traite de la lumiire de J. Herschel, traduit par Verhulstet Quetelel.p. 490. (6) stiluent dans I'elat oppose, d'oii resulle, tout aiilour de I' image coloree, une aureole de la teinle accidentelle ; en/in, au dela de cette aureole, il y a une tendance a la manifes- tation d'une nuance de la teinte meme de I'image. Vn tel etat de la retine peut elre compare a celui d'une surface vibrante, dans laqtielle les lignes nodales separent des vibrations de sens opposes. Cette theorie, qui fait dependre d'un seul principe i'en- semble des ph^nomcnes, a ete d'abord adoptee en France : nettement expos^e dans la 2""° edition du Cours de phy- sique de Lame el dans ie Traile de physiologic de Longet, elle est encore profess^e, je crois, par M. Paul Bert a la Faculte des sciences de Paris; mais elie a 6te fortement attaqu^e en Angieterre par Brewster, et, en Aliemagne, par plusieurs physiciens, surtout par M. Fechner(l). Ce dernier a d^fendu I'ancienne theorie, celle de Scherffer, d'aprte laquelie la ri^tine est simplement passive, et ne per^oit la teinte accidentelle que parce que la contempla- tion prolongee d'une couleur I'a fatiguee et a emouss^ sa sensibility pour les rayons de cette couleur. M. Helmholtz, qui, dans son Optique physiologique |)ubli^e en 1860, resume les diiferentes opinions, se range plutot a celle de M. Fechner, et, depuis lors, I'autorite des noms de ces deux savants a fait graduellement pencher la balance, m6me en France, du cote de I'ancienne theorie. Distrait par des recherches d'une lout autre nature , j'ai laisse Ie champ libre a mes adversaires. Aujourd'hui, je rentre dans la lice, parce que j'espere ramener les phy- siciens a mes idees, modili^es, du reste, en certains points. (1) Veber die subjectiven Complementarfarben (Ann. de Poggijndokffj 1838,1. XLIV, p. Sl.-j), (7) 1. he principal argument que j'avais fait valoir contre la th^orie de Scherffer, est que \es images accidenteiles se voient parfaitement dans I'obscurite la plus complete. Pour r^pondfe a cette objection, M. Fechner avance que, m^me dans une obscurity absolue, les yeux pergoivent de faibles sensations de lumiere, et il admet que la manifestation des couleurs accidenteiles dans I'obscurite est due k ce que la reline, fatigu^e par la contemplation de I'objet colore, decompose subjectivement les faibles Incurs en questioii comme elle decompose, suivant la meme th^orie, la lumiere eman^e d'une surface blanche sur laquelle on porte les yeux. On a accepte bien legerement cette opinion : Purkinje percevait nettement, dans I'obscurite, la lumiere int^rieure dont il s'agit; M. Fechner la perQoit egalement, ainsi que M. Helmholtz ; mais tons les trois se sont beaucoup fatigue les yeux par des observations sur les ph6nomenes subjec- tifs, et si Ton avail fait essayer I'experience par un nombre suffisant d'autres personnes, on aurait reconnu que le fail de la lumiere interieure est loin d'etre g^n^ral; M. Kaiser dil {Compendium der physiologischen Optik, 1872, p. 1S9) que I'exislence de la lumiere propre de la ratine n'est pas rare dans les yeux sains. Des six personnes dont j'ai parle plus haul, deux seulement, ma fille et ma belle-fille, voient des lueurs dans une obscurile complete : la premiere croit dislinguer de larges bandes dont chacune est formee d'un ensemble de points blancs, mais il lui est impossible d'af- firmer que ce n'esl pas la un simple effet de son imagina- tion; ma belle-fille voit nettement de nombreux filaments lumineux enchev^tres;quanlaM.Duprez, k mon fiis,amon gendre et k ma femme, ils ne voient absolument rien; et cependant, lorsque, apres avoir contemple pendant 30" k 40" le carre bleu ou le carr^ jaune plac^ sur un fond (8) noir, ils ferment lesyeux et se les couvrent avec un mou- choir, sans les presser, de maniere a exclure toute lumi^re exterieure , I'iniage accidentelle se monlre a eux avec une parfaite neltet^. En outre, ma belle-fille, chez laquelle, ainsi que je I'ai dit, des effets de lumiere interieure se manifestent sous la forme de filaments, m'assure que rimage accidentelle qui s'offre a elle n'est nullement compos^e de semblables filaments, et lui parait tout k fait unie. A I'appui de son opinion , M. Fechner fait remarquer que, lorsque I'objet colore que Ton a coutemple etait place sur un fond noir, son image accidentelle, dans les yeux fermes et converts, est entour^e d'une aureole reiative- ment claire. C'est, dit-il, que les portions de la retine qui environnent I'image etant reposees par I'aspect du fond noir, ont gagn^ en sensibility pour la lumiere interieure. Mais i'aur^oie se manifeste parfaitement chez les quatre personnes dont j'ai parle qui ne perQoivent pas de lumiere interieure. D'aiileurs, dans Thypothese de M. Fechner, il faudrait evidemment que loule la portion de la retine cor- respondante ^ Timage du fond noir se montr&t ^clairee par la lumiere interieure; or, chez mon fils, Taur^ole conserve, dans les apparitions successives de I'image accidentelle , une largeur qui, bien que variant un peu, n'atteint jamais celle de I'image du carre; chez mon gendre, Taur^ole, qui commence aussi par avoir des dimensions restreintes, s'etend bientdt, il est vrai, k presque tout le champ de la vision, mais ellereprend ensiiite ses dimensions premieres; enfin, chez M. Duprez, les choses se sont pass^es, dans certains essais, comme chez mon fils, et, dans d'autres , comme chez mon gendre. Les observations de ma belle-fille, laquelle perQoit, nous le savons, de la lumiere interieure disposee en une multi- ( 9 ) tude deHfilaments, sont plus signiiicatives encore : chez elle , de m^me que chez mon (ils , I'aureole conserve des dimensions limit^es; celte aureole et le champ noir exte- rieur sont, comme I'image du carre, parfailement exempts de filaments lumineux ; ceux-ci ne commencent a se mon- Irer que plus tard. Apr6s avoir contempl^ , pendant 40" le fond noir seul (c'etait une grande piece de velours) sans carr6 color6, et s'etre ensuite couvert les yeux, ma bellie- lille voit naitre les filaments apres un temps qui, dans trois epreuvessuccessives, a ete de 12", 16" et 9", tandisqu'a Ja suite de la contemplation du carr6 color^, les filaments, dans deux experiences, ne sont arrives qu'apres SO" el 30". Ainsi, loin que I'image accidentelle se soit dessinee sur la lumi^re inl^rieure, elle a, au contraire, empeche la pro- duction de cette lumiere, et s'est mise h sa place. Enfin, il est k peine n^cessaire de le dire, non-seule- menl chez M. Duprez, chez mon gendre et chez mon fils, mais encore chez ma belle-fille, I'image accidentelle du carre est pluslumineuse que lechampexterieur k Taur^ole. Comment, apres tons ces fails, conserver I'explicalion de M. Fechner? Comment n'attribuer a la retine qu'une simple passivity? Quant k I'explication de I'aureole, elle depend de la seconde partie de ma ih^orie , de celle qui concerne I'es- pace, partie dont je reserve le developpement pour une note ulterieure, si toutefois des fails suffisamment con- cluants viennent la confirmer. II. Pour appuyer I'opposition entre les couleurs acci- dentelles et les couleurs reelles qui les provoquent, j'avais cru pouvoiretablir en principe , dans mon Memoire, que, tandis que le melange de deux couleurs reelles complemen- taires produii du blanc , le melange de deux couleurs acci- ( 10 ) dentelles complementaires produit du nuir. j'avais ele con- duit a cette proposition par I'experience suivante, due a Scherffer. Sur une grande surface noire on juxtapose deux carr^s de papier 6gaux , Tun rouge, {'autre vert, ce rouge et ce vert ^lant, aulant que possible, complementaires Tun de I'autre; ie milieu de chaque carre est marque d'un point noir. On porte alternativement les yeux sur les deux points noirs, en demeurant k pen pres une seconde sur chacun; on continue ainsi pendant environ une minute, puis on ferme les yeux et on les couvre parfaitcment. On voit bientdt apparaitre,au sein d'une aureole blanch^lre, trois Carres juxtaposes, dont les deux extremes sont I'un vert, I'autre rouge, mais dont I'intermediaire, lequel corres- pond k la superposition des deux effets, est absolument noir. M. Fechner s'^leve contre le principe ci-dessus : cette experience, dit-il, n'esl evidemment qu'une autre forme decelle qui consiste k contempler la combinaison de deux teintes complementaires, c'est-.&-dire du blanc, et ou Ton obtient une image accidentelle noire. II fait remarquer que lorsque la couleur de I'objet contemple est le melange de deux couleurs simples non complementaires, celle de I'image accidentelle «st toujours le melange des acciden- telles de ces deux couleurs simples, et it se demande pour- quoi, dans ma theorie, le blanc ferait exception, pourquoi I'image accidentelle d'un objet blanc ne serail pas blanche elle-m6me. Ces objections sont en partie fondees; je reconnais I'in- exactitude du principe 6nonc6 plus haut, et j'explique actuellement d'une mani^re toute rationnelle le r^sultat de I'experience des deux carres : prenons encore, pour flxer ( H ) les idees, deux canes I'un rouge, I'autre vert, el suppo- sons ces deux couleurs telles, que I'image accidenlelle du carre rouge soil identique, quant k la leinte, au vert de I'autre carre, de sorle que I'image accidenlelle du carre vert aura, de son cole, la meme teinle que le carre rouge. L'oeil se portanl allernativemenl, el pendant un temps tres-court, sur chacun des deux carres, la reline peut ^tre considered comme reagissant simultan^ment contre les sensations des deux teintes de ceux-ci ; or les accidenlelles de ces memes teintes leur etanl reciproquemenl idenli- ques, la reline reagil ^galement contre ces deux acciden- lelles, et ne peut cons^quemment les produire ; voila pour- quoi Ton ne voil que du noir. II est ais^, en outre, de lirer de cette m^me experience un argument conlre I'explication de M. Fechner. En effel, le rouge elle vert bleu&tre des deux carrfe ne constituent qu'une parlie des couleurs qui composent la lumiere blan- che; reslent I'orang^, le jaune , une portion du bleu et le violet, couleurs donl le melange doit aussi donner du blanc. Si done, pour les personnes chez lesquelles se montrede la lumiere inlerieure, la contemplation alterna- tive des deux carres rendait simplemenl la ratine insen- sible au rouge et au vert bleuatre, I'organe devrait con- server sa sensibilile pour le melange des autres couleurs ci-dessus, et consequemment I'image accidenlelle interm6- diaire devrait paraitre blanchatre, ce qui n'esl pas. III. J'ai dit, dans les publications cilees au commence- ment de cette Note, que lorsque I'image accidenlelle d'un objet colore est projetee sur une surface donl la couleur n'a point d'element commun avec celle de I'objet con- tempie, la teinle de celle image accidenlelle se m6le avec celle de la surface: que, par exemple, lorsqu'on projette (12) sur une surface jaune I'image accidenlelle verle qui suc- c^de h la contemplation d'un oiijet rouge, on voit une image d'un vert jaun4tre; et j'ai fait remarquer que s"il n'y avail, dans la portion impressionnte de la retine, qu'une simple diminution de sensibilile pour la lumiere rouge, la sensibilite de cette meme portion pour la lumiere jaune ne devrait pas etre alt^ree, et qu'ainsi Tceil ne pourrsit perce- voir, sur la surface jaune, aucune image accidentelle. M. Fechner repond k cette objection en rappelant que les surfaces pcintes avec les matieres colorantes m^me les plus pures, reflechissent toujours une certaine quanlite de lumiere blanche, et il attribue la perception de I'image accidentelle sur la surface coloree, a ce que la portion affeciee de la retine decompose subjectivement cette lu- miere blanche. Mais, ainsi que je I'ai expose dans mon article de 1833, article que M. Fechner ne connaissait pas, le meme fait se manifeste avec les couleurs du spectre solaire : apres avoir regarde fixement un petit disque de papier blanc place dans le rayon rouge, j'ai porte les yeux sur un disque plus grand eclair^ par le rayon jaune, et j'ai vu parfaitemenl, sur celni-ci, une image d'un beau vert jaunatre. D'ofi provenait done ce vert, alors que la retine ne recevait que des rayons jaunes homogenes? Plus tard, M. S. Exner (1) a eflfectu6, bien que dans un but different, des experiences du mSme genre, en prenant plus de pre- cautions que moi pour assurer I'homogeneite des teintes, et il est arrive a des r^sultats analogues : par exemple , en projetant sur le violet I'image accidentelle produite par le rouge, il obtient du bleu ; etc. (i) Ueber einige neue subjective Gesichtserscheinungen (Archives de Pfluger, t. I", 1868, p. 37S; voir p. 389). (.13.) A la verity, M. Helmholtz, qui a fait une experience non identique, mais de m^me sens, essaie d'en raltacher ie resultat a la theorie de Scherffcr, en recourant a I'hypo- these de Th. Young. D'apr^s celle-ci, 1° en Chaque point de la reline existent trois series de fibres nerveuses des- tinees k nous donner respectivement les sensations du rouge, du vert et du violet; 2° I'excitation k pen pres ^gale de ces trois especes de fibres donne la sensation du blanc; 3° toute lumiere honiogene excite a la fois, mais inegale- ment, les trois especes de fibres : la lumidre rouge, par exemple, excite fortement les fibres appropriees au rouge , et faiblement celles du vert et du violet. En consequence de cette hypothese, lorsque I'ceil est frappe par une lumiere homogene, la sensation qu'il per- Qoit devrait etre consideree comme melee d'un peu de blanc, et c'est ce blanc qui, dans les experiences dont il s"'agit, serait subjeclivement decompose par la retine pour donner I'image accidentelle. On Ie voit, on ne parvient k appliquer I'ancienne theorie aux faits observes avec les couleurs horaogenes, qu'en s'ap- puyantsur une hypothese qui n'est pas prouvee. D'ailleurs, meme en adoptant les idees de Young, on se trouve en presence d'une difficulle : est-il vraiserablable que la faible sensation de blancheur qui, dans ces idees, accompagne celle d'une lumiere homogene, suffise pour produire les effets observes? Comment, par exemple, dans les expe- riences de M. Exner, la legere sensation de blanc m^lee k celle du violet, pourrait-elle, parsa decomposition subjec- tive, amener un resultat capable de donner, en se combi- nantavec ce violet intense, la sensation du bleu? IV. Enfin I'ancienne theorie est completement impuis- sante a expliquer les oscillations de I'impression qui s'ef- face, tandis que le fail decoule nalurellement de la mienne. M. Fechner, qui avail r^p(5l6 avec succes I'exp^rience prin- cipale par laquelle j'avais rendu ces oscillations bien ma- nifestes, altribue, dans son Memoire de 1838, les passages allernatifs de Timpression par les deux etats opposes, k des causes etrang^res pureinenl forluites, telles que de pelits mouvements de la l^le ou des yeux, etc. ; mais il est revenu en 1860 sur son opinion (1) ; voici comment il s'exprime : « Je dois mainlenant donner raison k Plateau contrai- rement k mes vucs ant^rieures, en ce que la forme oscilla- toire dans la marche des images accidentelles est bien la veritable.... d'ailleurs cela ne detruit en rien I'opinion eta- blie par moi, qu'il faut voir dans le phenomene des images accidentelles un contlit entre la persistance et I'epuisement {Abstumpfung), car, au fond, ce n'est 1^ qu'une simple ex- pression des faits, et nullement une hypothese; mais la forme periodique de ce conflit, forme que je croyais autre- fois devoir n'admettre que dans des conditions exception- nelles, est incontestablement la forme normale. » Dans mon experience principale, j'avais constate neuf oscillations reelles, c'est-^-dire cinq passages de I'^tat pri- mitif k r^tal oppose, et quatre de ce dernier 6tat k I'etat primitif. M. Marangoni, pnrfitant du fait, decouvert il y a longtemps par JVl. Grove, que les images accidentelles s'avivent sous Taction d'une lumiere intermittente, est parvenu, au moyen d'un proc^de ingenieux (2), a determi- ner, apres la contemplation d'un objet blanc 6clair<5 par le soleil, jusqu'a irente passages d'un 6tat a I'autre. (1) Elemenle der Psychophysik, Leipzig, l. IJ, p. 309. (2) Nuovo metodo di sviluppare nell' occhio le immagini accidentali abbaglianti (ISuovo Cimento, 2"" jerip, t. Ill, 1870, p. 132). ( IS ) Le fait d'un etal oscillatoire succedant k une impression proloDgee et subilement inlerrompue, n'est pas parliculier au pheuom^ne des images accidentelles; a la fin de mon M^moire de 1834, j'ai cit6 des cas ou d'autres sens que ceiui de la vue manif'eslenl une tendance analogue, et j'ai fait remarquer que la meme propriety parait s'etendre a des sensations d'un ordre purement moral : qui ne sait, par exemple, que souvent des jouissances vives sont sui- vies d'un sentiment de tristesse? celte tristesse se dissipe ensuile peu a pen, pour faire place a des souvenirs agrea- bles qui, eux-memes, finissent par s'efTacer. Ne sont-ce pas I^ des oscillations decroissanles du plaisir k la peine, de celie-ci au plaisir, et du plaisir a I'elat normal? Que la cause qui produisait en nous une douleur morale vienne subilement a cesser, nous ne serous pas simplement ra- menes k i'6lat oil nous nous Irouverions si cette cause n'avait pas exisle, mais nous eprouverons un sentiment de joie,qui pourra lui-meme parfois etre suivi de quelque uielancolie, c'est-a-dire qu'il y aura, dans ce cas, oscilla- tions d^croissantes de la peine au plaisir, de ceiui-ci a la peine, el de la peine k I'etal normal. Tout le monde sait que si Ton a regard^ pendant quelque temps des objets animfe d'un mouvemenl rapide de trans- lation, que ce mouvement soil reel ou qu'il r^sulle simple- ment pour nous de ce que nous nous mouvons en sens oppose, les objets immobiles sur lesquels nous portons ensuile les yeux nous paraissent se mouvoir dans une direction contraire k celle du mouvement primitivement contemple. Or, c'est 1^ une premiere oscillation, mais dont la nature est purement psychique. Ce ph^nomene a sugger^ a M. Helmhollz une explica- tion diflerenle : suivant lui, toutes les fois qu'on veut ( 16 ) ,; , arreter le regard sur I'un des objels en inouveinepl|,,^ii doit deplacer rapidement les yeux dans leWns ni^me de ce mouvement; une fois habitue a considerer ces impul- sions volontaires comme appropri^es k la vision d'un objel, on essaie de regarder flxeraent des objels immobiles ; mais les impulsions volontaires continuant sans qu'on en ait conscience, provoquent des mouvemenls des yeux, et comme la personne croit ses yeux immobiles, les objels lui paraissent se mouvoir, et cela suivant un sens oppose k celui du mouvement primilivement observe. Cette explication est fort iog^nieuse, maisj'ai d^crit un phenomene du m^me genre, auquel elle ne saurait evidem- ment convenir; je veux parler de Teffel produit par ma spirale tournante (1); I'experience est bien connue aujour- d'hui, je pense; qu'il me soil permis cependanl de la rap- peler ici en peu de mots : on fait tourner, dans son plan et aulour de son centre, un disque noir sur lequel est tra- c^e en blanc une spirale dont le centre coincide avec celui du disque; le mouvement doit elre notablemenl moins rapide que celui qui donnerait lieu a une teinle grise uni- forme. On voit alors sur le disque I'apparence d'un mouve- ment sans cesse renouvele du centre vers la circonference ou de celle-ci vers le centre, suivant le sens de la rotation. Or si Ton lient, pendant un temps suffisant, les yeux fixes sur le centre, et qu'on les porte ensuile sur un objet en repos, on croit voir celui-ci aller, dans le premier cas, en se rapetissani, et, dans le second, en grandissant. Ce ph6- nom^ne ^chappe, on le comprend, k Texplication de (1) Quatriime Note sur de nouvelles applications curieuses de la persislance des impressions sur la riline (Bull, de l'Acad. de Bel- GiQUE, 1849, t. XVI , 2»i« parlie, p. 234). (17) M. Hel&holtz, puisque, dans ce m^me phenom6ne, le mou- vement a lieu dans tous les sens k la fois; c'est, du reste^ ce qu'avait dejk fail remarquer M. Dvoi'ak, dans une Note (1) Oli il varie mon experience d'une maniere extre- inenaent curieuse. Enlin, dans cette Note , M. Dvorak montre, par d'inge- nieuses experiences, que si les yeux sont soumis a une lu- miere qui croit assez rapidement jusqu'i un certain point, puis reprendsubitemenlsavaleuroriginaire pour augmenler de nouveau, et ainsi de suite un grand nombre de fois, el qu'apres la derniere augmentation on laisse rinlensil6 constante, celle intensite parait, d'une maniere nelte, aller en d^croissant. Si, au conlraire, on fait decroitre la lumiere contemplce, pour lui rendre brusquement sa valeur pre- miere, la faire encore decroitre, el ainsi de suite, en lui laissant a la fin son intensite minima, cette intensity semble aller aussitdt en croissant. Ajoutons que M. Dvoi'ak a Irouve le moyen de se garantir de I'erreur qui pouvait r^suller des variations de I'ouverture de la pupille. Ici done, chose bien remarquable, ce n'est ni une sensation de couleur ni une sensation de mouvemenl, c'est une sen- sation de variation d'inlensite, qui donne lieu a une sensa- tion de nature opposee, c'esl4-dire h une premiere oscil- lation. Ainsi, en general , lorsqu'un organe, el specialemenl celui de la vue, est soumis pendant un temps sufBsant a un genre quelconque de sensation, il lend a nous douner en- suite spontanement une sensation contraire. Si le ph6no- mene des couleurs accidentelles n'avait pas ete connu, les (1) Versuche Uber die Nachbildervon Beizveranderungen (Bull, de l'Acad. de ViENNE, t. LXI, 1870, p. 257). 2 ( 18 ) fails que je viens de lappeler auraient pu le faipes^yoieS priori; ces m^mes fails prouvenl done surabondammeiil qu'ii est loul a fail impossible d'altribuer k la ratine un rdle simplemeiit passif dans la produclion des couleurs subjectives. Dans un travail recent (1), M. Mach, apr^s avoir rappel6 mon principe des oscillations, fail remarquer qu'il n'y a point de sensation contraire k celle du son, el que, par consequent, apres I'audilion prolong^e d'un son, Ton ne pent percevoir de sensation oppos6e. II fait remarquer en- core que le blanc et le noir ne sont point de nature con- traire, puisqu'ils ne peuvent s'entre-detruire; ils ne font que se meler, en produisanl du gris. D'apres cela, I'image accidentelle noire qui succ^de , dans les yeux ferm^s et converts, k la contemplation prolongee d'un objet blanc sur fond noir, ne serail pas une sensation opposee a celle de eel objet. Mais ma tbdorie 6chappe a cette difficulte : apres la contemplation, la ratine maintient son ^tat de reaction contre tons les rayons qui composent la lumi^re blanche, et eel ^tat de reaction est de nature opposee a la sensation du blanc; la preuve, c'est que si, au lieu de fer- nier les yeux , on les dirige sur une surface blanche, on voit une image obscure, ce qui montre que la portion affect^e de la retine continue k r^agir contre la lunii^re blanche, et en d^truit en partie la sensation; or, puisqu'il y a destruction , il y a n^cessaireinent opposition. Enfin les experiences de M. Mach sur les sensations de mouvemenl qui font I'objet du travail dont il s'agit, le con- duisent a la conclusion qu'elles ne sont pas suivies de sen- (1) Grundlinien der Lehre von den Beioegungsemjifindungen , Leip- zig, 187b, p. 55. ( 19) "33flHi|^^Kes. Ces sensations de mouvemenl sont celles que per^oiPuh observateur enfcrme dans un appareil qui I'entraine dans un mouvemenl de translation ou de rota- lion, sans que cet observateur puisse voir les objels exle- rieurs. Dans ces conditions, I'observateur ne per^oit le mouvemenl que lorsque ceiui-ci est accelere. Si I'acc^lera- tion cesse, de faQon que le mouvemenl devienne uniforme, i'observateur croit encore, pendant quelque temps, se sen- lir entraine dans le me.mesens, ce qui conslitue la persis- tance de la sensation ; mais celle-ci n'est pas suivie d'une sensation de mouvemenl en sens contraire. Ce dernier resullat serail une veritable exception a mon principe, puisque, pour les sensations de mouvemenl dont s'esl occupe M. Mach, on peul evidemment concevoirdes sensations opposees; mais les experiences de I'auteur ne me paraissent pas sufiisamment conchianles. En effet, on sail que, dans le cas de la vision, une contemplation de courte duree donne lieu simplement a la persislance de I'impression primitive, laquelle pent, dans des conditions favorables, etre alors assez longue, et qu'il I'aut prolonger la contemplation pour obtenir une image de nature oppo- see. Or, on le comprend, dans les experiences de M. Mach, la necessite de I'accelcration du mouvemenl met obstacle a ce que ce dernier ait, comme mouvemenl accelere, une grande duree, el si Ton pouvait le prolonger davantage comme tel, il seiait peut-etre suivi d'une sensation de sens contraire. Revenons aux couleurs accidenlelles. Supposons qu'apres la contemplation prolongee d'un objet colore, on porte les yeux sur un champ d'une autre couleur, et consid(5rons en • particulier les deux circonslances suivant^s : en premier lieu, la couleur de ce champ est homogene, el sa leinle (20 ) n'entre point comme element dans celle de 'MlBlifiWiJPW' pie; alors la retinedeveloppe sponlanement inM^me op- poste h celle-ci, ct cette leinle se mele, comme on I'a vii plus haul, avec celle dii champ, pour constituer Timage accidentelle. En second lieu, la couleur du champ n'est pas homogene, el, parmi ses teintes elementaires, elle en con- tient une idenlique a celle de i'objet; dans ce cas, la retina qui, pendant la contemplation, reagissait conlre Taction de cette teinteet en affaiblissaitia sensation, continue la meme reaction, de sorte qu'elle ne pergdit avec intensite que I'ensemble des autres teintes elementaires du champ. Con- sequemment quand, apres la contemplation prolongee d'un objet rouge, par exemple, pose sur un fond noir, on jetle les yenx sur un fond blanc, la portion de la retine qui avait r^agi contre la lumiere rouge, continue sa reaction contra les rayons de cette couleur, de sorte qu'elle per^oit avec une intensile relativement plus grande la sensation causae par I'ensemble des autres rayons de la lumiere blanche, ensemble qui donne le vert accidentel. Seulement, puisque les couleurs accidenlelles ne sont pas toujours les coniple- mentaires des reelles qui les ont provoqu^es, il faut ad- mettreque la retine, en m^nie temps qu'elle reagit contre la couleur qui I'a impressionnee, reagil aussi contre d'autres couleurs de teintes voisines. On le voit, je fais jouer a la reaction de ia retine le meme role que I'ancienne theorie fait jouer a la fatigue de cet organe. Presentons une derniere remarque. Pour que la reaction de la retine , reaction qui s'exerce pendant la contempla- tion meme d'une couleur, d^veloppe ensuite une teinte subjective, il n'est pas indispensable, on le comprend, que {'action de cette couleur cesse brusquement; la retine peut y etre soustraite par degres. Voici une maniere simple de ( 21 ) ^^^'expcrience; elle m'a ete indiquee, il y a longtemps, Ip^ xM, ^^heatstone : on recouvre d'un papier colore un morceau de carton de grandeur convenable; pour fixer les idees, je supposerai le papier de couleur rouge et ie carton carr^, de 15 centimetres de c6te. On tient ce carton a la main, le soir, dans une position a peu pres horizonlale, el de fagon qu'il soil bien eciaire par une iampe munie de son abal-jour; on le regarde fixement pendant 30", puis on I'inciine avec une certaine lenteur dans un sens tel , qu'il passe graduellenient dans I'ombre; la duree de ce mouvemenl d'inclinaison pent n'elre que d'environ 3". Pendant ce meme mouvement, on voit la couleur rouge s'affaiblir et se changer en gris, puis apparait le vert acci- dentel , qui, lorsque le carton est tout k fait dans I'ombre, atteint bientot son maximum d'intensit^. Mais alors, comme ma theorie le fait prevoir, I'impression accidentelle ne pre- sente ancune trace d'oscillations; elles'^vanouitlentement, et d'une maniere parfaitement continue. Si, apres une contemplation de 30" egalement, on in- cline, an contraire, le carton avec rapidite pour le faire passer d'un seul coup dans i'ombre, la couleur verte acci- dentelle manifesto des oscillations nettement accusees; seulement ces oscillations consistent simplement en des disparitions et reapparitions de la couleur verte, sans phases rouges intermediaires. [/experience a ete effectuee a deux reprises par mon gendre, puis, egalement k deux reprises, par mon fils F^lix, et toujours avec les m^mes resultats. Nola. Depuis la presentation de cette Note i I'Aca- demie, j'ai eu cbnnaissance d'un travail de M. Bering, mliliM : Zur Lehre vom Lichtsinne, etpublie, en 1873-74, ( 22 ) dans les tomes LXVIII el LXIX du Bulletin de rAcacr3B| deVienne. Ce travail m'esl parvenu trop lard pour que j'aie pu I'eludier dans lous ses details; j'ai du me borner aux points qui me paraissent le plus en rapport avec le contenu de ma Note; voici ce que je crois pouvoir en dire aujour- d'hui d'apres cet examen incomplet. L'auteur s'eleve contre I'ancienne tlieorie des couleurs accidentelies, en s'appuyant principalement sur le fait des oscillations de I'impression; il s'eleve aussi contre ma theorie, en attaquanl surtout la proposition dent j'ai moi-m^me reconnu I'erreurdans la Noleactuelle; il parait ne connaitre ma theorie qu'imparfaitement, et il avance qu'elle n'explique qu'une partie des faits; je ne sais s'il motive cette accusation. Entin il propose une theorie nou- velle, d'accord, dit-il, avec les notions raodernes sur la physiologie des nerfs; il admet les principes suivanls : I'excitatiou produite par la lumiere sur la reline determine, dans la substance nerveuse de I'organe, une alteration chimique, qu'il nomme desassimilalion; mais, en nieme temps, la retine reagit, et exerce un travail de reparation, ^y assimilation; cette assimilation tend a ramener I'organe a I'etal de repos, c'est-a-dire h I'absence de sensation, et cons^quemment elle dirainue progressivement I'intensite de la sensation perdue. Jin second lieu, quand une portion limitee de la reline est seule directenient excit^e, les por- tions environnantes subissent, par une influence lalerale, un accroissemenl d'assimilation, de sorle que leur obscu- rity parait augmenler. L'auteur applique surtout ces prin- cipes aux phenomenes que pr^sente un objet blanc sur fond noir, ou vice vers^; le temps m'a manque pour cher- cher comment il ^tend les m^mes principes aux couleurs, el pour me fairc une id6e nettc de cette nouvclle theorie; ( 23) elic me semble coincider sensiblement avec la luienne, lant k I'egard des ph^nomenes siiivant le temps, qu'^ regard des phenomenes suivant I'espace : les deux th6o- l-ies invoquenl une reaction de la retine et une action literaiede I'impression; mais M. Hering d^finit la nature de la reaction. SUR LES COULEURS ACCIDENTELLES OU SUBJECTIVES; PA* 3VI. J. PliA-TElAlJ, HEMBRE DE L'AGADi^MIE ROYALE DE BELGIQIIE. BRUXELLES, F. HAYEZ, IMPRIMEim OF, l'ACAD^MIE ROYALE DE BELCIQUE. 1876 Extrait des Bullelins de I' Academic royale de Belgique, •2"= serie, t. XLII, n"" 9 et 10; 1876. SUR LES COULEURS ACCIDENTELLES OU SUBJECTIVES. Dans ma Note pr^cedente (1) , apres avoir rappel6 suc- cinctement les principes sur lesquels repose mk theorie , savoir la reaction de la ratine et les oscillations de I'iin- pression selon le temps et selon I'espace, je me suis at- tach6 a r^pondre aux principales objections soulevees contre la premiere partie de cette theorie, celle qui con- cerne" le temps; je crois avoir montr^ I'insuffisance du principe de la fatigue et de la lumiere propre de la r6tine, et avoir 6tabli la n^cessil^ d'adopter celui de la reaction de I'organe. Dans la Note actuelle, je reviens de meme sur la secoude partie de ma theorie, celle qui concerne I'espace , et j'espere en faire voir ^galement la Mgitimite. Mais, avant d'aborder cette derni^re question, je dois presenter quelques remarques au sujet de la Note pr6c6- dente. Et d'abord, je croyais ^tre le premier h signaler le fait que )a teinte de I'image accidentelle est loin d'etre tou- jours complementaire de celle de I'objet pr^alablement contemple; j'ai reconnu, depuis, que Briicke (2) avail, des (1) Bullet, de l'Acad. roy. de Belgique, 187S, 2™ serie, t. XXXIX, p. 100. (2) Veber Erg&nzungs- und Contrastfarhen^ (Bullet, de l'Acad. de Vienne, 2""= partie, t. LI, p. 461 ). (4) 1865, constat^ cette difference; seulement it en dohne une explication autre que la mienne : suivant lui, I'addi- tion d'une certaine quantity de lumiere blanche h une lumiere coloree ne se borne pas a p&lir cette derniere, elle altere, en outre, la nature de la teinte perdue; il rappelle une experience d'Aubert (1), consistant a faire tourner rapidement un disque blanc portant un secteur bleu de 60° de largeur angulaire; la teinte uniforme observ^e n'est pasun bleu p^le, mais un violet p≤ un secteur orang6 substitu^ au secteur bleu a donne une teinte oil le rouge paraissait en exces. Briicke en conclut comme probable que si, par exemple, en porlant les yeux sur une surface blanche apres avoir conlemple un objet jaune, on percoit une image accidentelle violette et non bleue, c'est que IMmpressiori de la lumiere blanche envoy^e par la surface se mSle a I'impression complementaire bleue, et la fait passer au violet. Cette opinion serable difficilement admissible; en effet, I'image accidentelle qui suit la contemplation du bleu est, pour la plupart desyeux, orangee et non jaune; or, dans les experiences de Briicke , un secteur jaune a simple- ment donne, par la rotation du disque , un jaune -pale et non un orang^ p^le. En second lieu, I'objection la plus forte que j'ai dirig^e, dans mes Merits de 1833 et de 1834, contre la theorie de Scherfferest, ainsi que je I'ai rappeie (Note precedente), le fait de la manifestation des images accidentelles dans I'obscurite la plus profonde; or je sais aujourd'hui que cette meme objection avait dej^ ele avanc^e contre la (1) BeitrSge zur Physiologie der Netzhaut (Abhandlungen der ScHLESiscHEii Gesellschaft, 1861 , p. 49; voir §§ 20 k 22). (S) meme theorie a la fin tlu si^cle passe, par Venturi (1), qui avail entburd ses experiences des plus grandes precau- tions. En troisieme lieu , bien que je regarde comme superflu d'ajouter de nouveaux arguments k ceux que j'ai exposes soit contre la theorie de Scherffer simplement, soit contre I'extension que lui a donn^e Fechner en faisant inter- venir la lumiere propre de la ratine, je citerai cependant les deux suivanjs, qui ne me paraissent pas sans inter^t : Je trouve le premier dans le singulier Memoire de Schopenhauer (2) sur la vision et les couleurs. Apres avoir enonce certaines objections, dont les unes sont sans valeur et dont les autres coincident avec une partie des miennes, I'auleur ajoute : « Un fait connu s'eleve encore contre I'explication de Scherffer, c'est que nous voyons le spectre physiologique le plus ais^ment et le plus nette- ment le matin , aussitot apres notre reveil ; mais c'est pr^cis^ment alors quCj par suite du repos prolong^, la ratine a sa plus grande vigueur, et qu'ainsi elle est le moins disposee k se faliguer par la contemplation d'une couleur pendant quelques secondes, et k s'affaiblir de maniere k perdre sa sensibility pour cette couleur. » Le second argument m'est fourni par un article de Becker (3) : « On sait, » dit I'auteur , « que de tr6s-faibles impressions lumineuses ne sont plus per^ues comme difK- (1) Indagine fisica sui colori. J'ignore la date de la premiere publica- tion de ce travail; il a ete reimprime a Modene en 1801. (2) Veber das Sehen und die Farben, Leipzig , 1816. Je n'ai pu con- sutter que la troisieme edition , publiee en 1870 ; le passage dont il s'agit est ^ la page 51 de cette troisieme edition. (5) Zur Lehre von den subjectiven Farbenerscheinungen ( Ann. de PoGGENDORFF, 1871 , t. V du Supplement, p. 505). 2 (6) remment color^es ; or une lumiere assez faible pour ne plus permeltre de distinguer les differences de couleur, est encore Ires-vive en comparaison du brouillard lumi- neux interieur qu'on apergoit dans une obscurite com- plete; e'est ce dont chacun peut aisement se convaincre. Ce brouillard lumineux interieur parait toujours incolore, comnae toule impression lumineuse trte-peu intense; si done la ratine ^tait partiellement ^puis^e par la cause qui I'a excit^e , il ne serait pas possible que I'impression acci- dentelle fut color^e, elle se montrerait simplement plus sombre. Mails, au lieu de cela, I'image complementaire qui apparait dans le champ compl^tement obscur de la vision, est , du moins chez moi , tres-vivement color^e , et , lo^rs de sa degradation, je constate nettement une diminution d'intensite, et non une simple tendance vers la blan- cheur. » En quatri^me lieu, dans ie Nota qui termine ma Note prec^dente, j'ai dit que Ie travail de Bering avait paru en 1873 et 1874 dans les tomes LXVIIl et LXIX du Bulletin de I'Academie de Vienne ; or la premiere communication est de 1872, et est inser^e au tome LXVI, et la derniere au tome LXX, publie en 1875. En outre, je n'ai donn6 alors qu'une id^e trop incomplete de ce travail ; mainte- nant que j'ai eu le loisir de I'examiner , je puis indiquer en peu de mots comment I'auteur etend les principes de sa th^orie aux images accidentelies color^es. II admet que la substance visuelle est susceptible d'^prouver, sous Taction de la lumiere, trois sortes de modifications, dont la pre- miere donne les sensations du noir et du blanc , la seconde celles du bleu et du jaune, et la troisieme celles du rouge et du vert; ou bien que cette m^me substance visuelle se compose de trois substances diff^rentes, appropri^es cha- (7) cune h I'un des couples de sensations ci-dessus ; il adopte cette derniere mani^re de voir, quoique moins probable seion lui , parce qu'eile se pr^te plus ais^ment a Texposi- tion de la Ih^orie. II nomme les trois substances en ques- tion substance noire-blanche , substance bleue-jaune, et substance rouge-verte. Dans chacun de ces couples de sensations, I'une des couleurs proVient d'une desassimila- tion , et I'autre, qui lui est opposee, d'une assimilation [Nota de la Note prec^dente). Cela pose,, pendant que Ton contemple du rouge, par exemple, si la sensation de cette couleur est due a une desassimilalion, la reaction de I'or- gane determine une assimilation graduelie qui atTaiblit cons^quemment la sensation du rouge; et si alors on jette les yeux sur une surface blanche, la portion primitivement excit^e de la retine 6tantdevenue moins sensible au rouge, per§oit la teinte compl^mentaire., Bering ne parle pas du cas oil la couleur iaccidentelle se perQoit dans les yeux fermes et converts ; mais comme il admet I'existence de la Iumi6re propre de la retine , c'est sans doute alors, pour lui, cette lumiere propre qui joue le memo r6ie qu'une surface blanche sur laquelle on por- terait le regard. J'arrive actuellement a la seconde partie de ma theorie. Je rappelle de nouveau qu'eile consisle a admettre, selon I'espace, des oscillations analogues a celles qui ont lieu selon le temps. Dans ce dernier cas, nous le savons, I'image que perQoit la retine abandonnee a elle-meme apres la contemplation prolongee d'un objet colore , con- serve pendant un temps tres-court la couleur de cet objet; puis vient une phase de couleur opposee, qui dis- parait et reparait plusieurs fois, en alternant, dans des conditions favorables, avec des reapparitions de la couleur (8 ) de I'objet. Or, dans le cas de I'espace, et pendant la c|^» templation de I'objet color6 , on trouve d'abord, tout le long du contour de I'image de cet objet, une bande Stroke de meme couleur que celui-ci, et qui en augmente les dimensions apparentes, c'est I'irradiation; puis, au del^ de cette bande, on observe en g^n^ral une zone de la teinte oppos^e, zone au dela de laquelle, dans certaines circonstances , peutse montrer une nuance de la couleur m^me de I'objet. On le voit, les ph6nom6nes selon I'es- pace sont , pour ainsi dire, la traduction des phenomenes selon le temps^. Le premier dont nous avons a nous occuper, est done I'irradiation. Une th^orie tres-ancienne la fait d^pendre d'une propagation de I'impression dans les 6I6ments ner- veux adjacents h ceux qui sont directement excites par la lumiere. Dans un Memoire(l) publie en 1839, oil j'ai etudie les lois du ph^nomene, j'ai t&che d'etablir la verity de la theorie dont il s'agit; mais cette meme theorie a ren- contre, surtout depuis I'apparition de mon travail, un grand nombre d'adversaires. Ceux-ci ont refuse d'adopterle prin- cipe de la propagation de I'impression, et ont avanc^ plu- sieurs autres theories, que nous allons passer en revue. Si nous laissons de c6t6 I'opinion de Van Breda (2) , laquelle ne supporte pas un examen serieux, et celie de Pope (3) , ddduite de I'aspect en forme de croix que pre- (1) M4moire sur F irradiation (Mem. de l'Acad. roy. deBelgiqbe, t. XI). (2) Eenige waarnemingen over de zoogenaamde nabeelden (Verslagen EN MEDEDEELrNGEN DER KONINGL. AkAD. VAN WETENSCH. VAN AMSTERDAM , afdeeling Natuurkunde , 1836 , t. V, p. 342 ). '(3) Beitrage zur Optik des Auges (Archiv fur Ophthalmol., 1863, t. IX, 1" parlie, p. 41; voir p. 60). (9) sente k I'auteur un point lumineux observe de loin , les theories propos^es depuis la publication de mon M^moire , peuvent se ranger en quatre groupes. Le premier coraprend : la th^orie due originairement a Kepler (1) , adoptee plus tard par Haidinger (2) , puis re- produite avec d^veloppements par Welcker (3), qui attribue I'irradiation k ce que les rayons inlands d'un point eloigne se reunissent dans I'oeil avant d'atteindre la' ratine, de sorte qu'ils vont peindre sur cette membrane non un point, mais un petit cercle ; celle de Trouessart (4), d'apr^s laquelle I'irradiation aurait pour cause « la dilatation de I'image de I'objet lumineux qui nalt de ce fait que, pour des distances tres-petites ou Ires-grandes, non-seulement les rayons partis' d'un menie point de I'objet ne vont pas concourir en un seul point sur la ratine, mais, de plus, qu'ils se divisent en faisceaux distincts qui multiplient chaque point de eel objet » ; enfin celle de Dove (S), qui veut que, dans la contemplation simultan^e d'un objet clair et d'un objet sombre, I'oeil s'accommode differem- ment pour les deux. Haidinger, Welcker et Trouessart, (1) Ad Vitellionem paralipomena, quibus aslronomiw pars optica traditur, Francfort, 1604. (2) Das Inlerferenz-Schachbrettmusler und die Farbe der Polarisa- liohsbUschel (Bullet, de I'Acad. de Vienne, 18S1, t. VII, p. 389; voir p. 396). (3) Veber Irradiation und einige andere Erscheinungen des Sehens , 6iessen,18S2. (i) Recherches sur quelques ph^nomenes de la vision, Brest, 1854, p. 130. (b) Ueber die Ursachen des Glanses und der Irradiation , abgeleitet aus chromatischen Versuchen mit dem Stereoskop (Ann. de Poggen- DORFF, 1831, t. LXXXIII, p. 169). ( 10) myopes tous les trois., nient I'existence de rirradiation a leurs distances respectives de vision distincte ; j'ignore si Dove est egalement myope, mais il admet une distance de vision distincte, k iaquelie, selon liii, I'effet qu'il sigaale n'a pas lieu. Les theories du second groupe consid^rent I'irradiation comme r&ullant des aberrations de I'eeil : Respighi (1) fait concourir au ph^nomene I'aberration de sph^ricit^ et I'aberration chromatique; Meyer (2) le fait dependre de i'aberration de sphericit^-seule, et Fick (3) de I'aberra- tion chromatique seule; ce dernier avance, en outre, que les ph^nomenes exposes par moi sous le nom d'irradia- tion, sont, en partie, des illusions purement psychiques dans nos jugemenls sur les rapports de grandeur. Le troisieme groupe, le plus nombreux, est une com- binaison des deux precedents; les theories dont il se com- pose admettent , pour les objets peu distants, I'effet des deux aberrations de I'ceil, et, pour les objets 6loign6s, celui d'une accommodation inexacte. Les auteurs de ces theories sont Arago (4), Fechner (5), Fliedner (6), Cra- (1) Sulla irradiazione oculare (Mem. de l'Institot de Bologne, 1858, t IX,p. S13). (2) Ueber die sphdrische Abweichung des menschlichen Auges ( 4nk. DE POGGEBDOBFF, 18S3, t. LXXXIX , p. 540). (3) Einige Versuche Uber die chromatische Abweichung des mensch- lichen Auges (Anciirv. fur Ophthalmol,, 1836, t. II, 2™ partie, p. 70). (4) CoBPTEs RENDijs , 1839, t. VIII, note de la page 883. (5) Ueber die subjectiven Nachbilder und Nebfinbilder ( Ann. de Pog- GENDORFF , 1 840 , t. L , p. 19b ). (6) Beobachlungen Uber Zerslreuungsbilder im Auge, sowie Uber die Theorie des Sehens (Ibid., 18b2, t. LXXXV , p. 321 ; voir p. 348). Zur Theorie des Sehens ( Ibid., 1833, t. LXXXVIII , p. 29 ). (il ) mer (1), Burckhardt (2), Volkman (3) et HelmhoUz (4). Les deux premiers, Arago et Fechner, semblent ignorer le pouvoir d'accommodation ind6fini des bonnesi vues; Fliedner est blen pres de le nier ; Burckhardt incline k le consid^rer comme tout a fait exceplionnel ; Volkmann et Helmholtz paraissent croire que les phenomenes d'irra- dialion developpes qui ont ^l6 constates sur des objets eloign^s , ne se manifestent que dans des yeux plus ou moins myopes; enfln, suivant Cramer, dans la contem- plation d'un appareil d'irradiation , I'ceil s'accoramode, pour les parties lumineuses, ^.une distance moindre que la distance reelle; et cela en verlu du principe que nous sommes port^s k regarder comme plus rapproch^s les objets de plus grand eclat. Au quatrieme groupe n'appartientqu'une seule th^orie, celle de Powell (5) et d'Andre (6), qui cherche I'origine de , (1 ) Bijdrage tot de verklaring der soogenaamde irradiatie-verschijn- selen (Nederlandsch Lancet, S""^ serie, 3«"= annee, 1853-54, p. 861 ). (2) Zur Irradiation (Verhandl. deb Schweizer Naturforschendek Gesellschaft IN Basel, 1854, 1" livraison, p. 154). Ueberden Gang der Lichtstrahknim Auge (Ibid., 1855,2"'= livraison, p. 269). (3) Ueher Irradiation (Berichte uber die Vekhandlungen der konigl. SXcHSiscHEN Gesellschaft DER Wissenschaften zu Leipzig, 18S7, t. IX, p. 129). Ueber die Irradiation , welcheauch bei vollstUndiger Accommodation de& Auges stall hat {BvLLET . de l'Acad. de Munich, 1861, t. II, p. 75). •- Physiologische Vntersuchungen im, Gebiele der Oplik, 1" livraison , Leipzig, 1863. (4) Physiologische Optik, Leipzig, 1860, § 21 in" III. (5) On irradiation (Meh. de i,a Soc. Astron. de Londres, 1849, t. XVIII, p. 69). (6) De la diffraction dans les instruments d'optique; son influence sur les observations astronomiques (Jobrn. de phys. de d' Almeida , 1876, t. V,' pp. 263 et 304). (12) I'irradiation uniquement dans la diffraction au bord de la pupille. Deux theories n'ont pu trouver place dans les groupes ci-dessus, parce qu'elles ne me sont pas parfaitement con- nues: La premiere est celle de Scheffler(l) qui suppose, outre les aberrations de I'oeil , certains d^placements des b&ton- nets de la retine. L'article que je cite renvoie constam- ment a I'ouvrage Die physiologische Optik du m^me auteur, ouvrage que je n'ai plus en ma possession. La seconde est celle de Valine ; je ne sais si elle est ex- pos^e quelque part in extenso; d'apres le resume trop peu explicite donn6 dans les Coraptes rendus (2), I'irradiation proviendrait de ce que, par suite des vices de structure des milieux de I'oeil, I'imaged'un point lumineuxesi entouree d'une aureole formee par des rayons en dehors du piuceau efScace. Mentionnons, en outre, les bizarres opinions de Ruete(3) et de Forbes (4). Selon le premier, I'irradiation resulterait d'une communication par I'intermediaire du cerveau, et non directe, des ^l^ments r^tiniens excites aux Elements voisins. Selon le second, il n'y a de veritable irradiation que pour des objels tr6s-Iumineux ; avec un ^clat moindre, on peut observer des effets semblables, « mais ils sont d'une nature diff^rente, et se produisent entre la forma- tion de I'imagesur la ratine etsa reception par le cerveau. » (1) Die Statik der Netzhaut und die pseudoskopische Erscheinungen (Ann. de Poggendorff, 1866, t. CXXVH, p. 10b; voir p.21). (2) De la vision consid6r4e dans les influences en quelque sorte moU- culaires, emercies dans les refractions, et du phinomine de I'irradia- tion (COMPTES rendus, 1832, t. XXXV, p. 679). (5) Lehrbuch der Ophthalmologie, Brunswick, 1845, p. 79. (•i) The Coming transit of Venus (Journ. Nature , 1874, t. X, p. 28). ( i3.) Voyons maintenanl si ces diverses theories peuvenl rendre raison de tous !es ph^nomenes de I'irradiation. Et d'abord nous devons rejeter sans discussion la pre- miere, eel le de Kepler, Haidinger et Welcker. En effet, elle suppose des yeux myopes; or, pour des yeux de cette espece, raccomrnodation ne s'exerce qu'entre des limites tres-resserrees, la distance de vision distincte est courle et a peu pr^s determinee, et I'image formee sur la ratine par un point situe au dela de cette distance, est necessaire- ment un cercle de diffusion , dont le diamelre augmenle avec I'eloignement du point. De la resulle que les images des objels plus clairs que le fond sur lequel ils se dessinent , doivent paraitre nolablement agrandies, et d'autant plus que ces objets sont plus distants; aussi,. pour les myopes, les effets sont considerables, et la vision des objets ^loignes est confuse. Maisce n'est pas 1^ de I'irradiation; il ne faut ^videmment donner ce nom qu'aux phenom6nes qui se manifestent dans des yeux capables de voir nettement depuis une distance petite ou moderee, jusqu'^ celle des astres, c'est-a-dire dans des yeux normaux, ou, tout au plus, dans des yeux I6g6reraent presbytes. C'est ainsi que j'ai consider^ I'irradiation dans men Memoire, et j'ai dit expressement, au § 35 de ce travail, apres avoir enumer^ les personnes qui m'ont aide dans mes experiences : « Je dois ajouler que la plupart de mes appareils etant destines k etre observes de loin, j'ai du m'imposer, pour les expe- riences qui s'y rapporlent, une condition de plus dans le choix des personnes; c'est de n'avoir recours qu'a celles dont la vue ^tait bonne, ou du moins non myope. » Citons ici I'opinion de Fick (1) : « Selon moi, dit-il, (1) Page 72 du Memoire cM. ( 14 ) pour faire une distinction rigoureuse des notions et des fails, il faudrait entendre exclusivement par irradiation r^iargissement apparent des objels clairs vus avec I'ac- commodation aiissi parfaite que possible. » Quant k la th^orie de Dove, en admettant meme avec ce physicien que, lorsque nous contemplons de loin une figure blanche sur fond noir, I'oeil s'accommode diff^rem- ment pour le blanc et pour le noir, n'est-il pas naturel de penser que Taccommodalion a lieu pour ce qui est le plus apparent, c'est-^-dire pour la figure blanche? Passons au second groupe. II est incontestable que les aberrations de I'oeil , les vices de structure des milieux qui composent cet organe, et la diffraction au bord de la pu- pille, produisent, le long du contour de I'image d'un objet clair projet6 sur un fond -obscur, une petite bande qui accroit les dimensions apparentes de cet objet; mais cette petite bande est-elle assez large, ou plut6t est-elle assez lumineuse dans toute sa largeur, pour donner lieu aux ph^nomenes d'irradiation ? C'est ce que nous aurons k examiner. En premier lieu, dans une Note (1) publiee en 1839, Note qui malheureusement n'a pas 6t6 suffisamment repandue, el est restte ignoree de la plupart des savanls qui ont ^crit sur I'irradiation , j'ai montre que I'aberration chromatique de I'oeil ne joue aucun rdle appreciable dans le ph^nomene. Qu'il me soit permis de reproduire ici une .partie de cette Note. « On pent ais^ment decider par des experiences directes si I'irradiation est, ounon,due^ I'aberration chromatique. (1) Pfote sur I'irradiation (Bullet, de l'Acad. de Belgique, t. VI, 1" partie, p. 501). (15) II suffit, en effet,d'essayei' si I'irradiation se produit encore lorsque I'otjetest eclair^ par one lumiere homog^ne Or j'ai ex^cut6 les experiences par les precedes que je vais indiquer. » « La lumiere homogene dont j'ai fait usage est celle que donne, comme on sait, la flamme d'un melange d'al- cool, d'eau et de sel. J'ai imbibe de ce melange un paquet de meche de colon que j'ai plac6 derriere uhe glace d&- polie dispos^e verticalement. Le melange allume dans I'obscurite me.donnait une flamme volumineuse, et la glace depolie obsbrvee de I'autre c6t6 formait un champ lumineux d'un ^clat suflisant. Pour rendre la lumiere plus homogene encore, j'ai interpose, entre la flamme et la glace depolie, un verre jaune d'une couleur intense. Tout elant ainsi prepare, j'ai place successivement devant la glace depolie I'appareil k jour decrit dans le § 28 de mon Memoire, et celui qui a servi dans mes experiences de mesure, apr^s avoir amene, dans ce dernier, le bord ver- tical de la plaque mobile dans leprolongement de celui de la plaque fixe. Ces appareils se trouvaient ainsi projet^s sur un champ d'un eclat assez considerable , et d'une lumiere tenement rapproch6e de I'homogen^ite , qu'en les observant par refraction k travers Un prisme plac6 verti- calement a 5 metres de distance, leur image non-seule- ment conservait une parfaite nettete, mais ne pr^sentait laleralement qu'une nuance verd&ti-e si l^gere, qu'il failait beaucoup d'attention pour I'apercevoir. » « Or, dans les circonstances que je viens de decrire et qui devaient n^cessairement exclure les effets qui au- Taient pu d^pendre de ^aberration de refrangibilit^, les appareils ci-dessus m'ont fait voir une irradiation tr^s- d^veloppee. Le meme resultat s'est montre k deux des ( 16) personnes qui m'avaient aid6 dans les experiences de mesure rapport^es dans mon Memoire, et qui sonl, par consequent, habitudes a juger des ph6nomenes d'irradia- tion. » « Pour comparer ensuite les effets produits k ceux que ferait nailre une lumiere composee et d'un ^clat sem- blable, j'ai place, ^ cote de la glace depolie ci-dessus , une autre glace pareille, derriere laquelle j'ai allurae plusieurs bougies dispos^es de mani^re a I'edairer d'une lumiere uniforme, et j'ai eioigne ou rapproche ces bougies jusqu'i ce que I'eclat de cette seconde glace par6t egal k celui de la premiere. Un ecran separait d'ailleurs les bougies de la flamme d'alcool, de maniere que chacune des glaces ne recevait qu'une seule des deux lumieres. J'avais ainsi deux champs lumineux d'un m^me edat, mais dont I'un etait edaire par une lumiere jaune homogene, et I'autre par une lumiere qui, sans etre blanche comme celle du jour, est cependant evidemment assez composee pour le cas dont il s'agit. J'ai place alors, devant ces deux champs lumineux, des appareils d'irradiation identiques entre eux, de ma- niere qu'en les observant simultanement, il etait aise de voir si les irradiations developpees par les deux lumieres differaient sensiblement I'une de I'autre. » . Or cette comparaison faite par les deux personnes dont j'ai parie plus haul et par moi, ne nous a montre aucune difference appreciable : les deux appareils manifestaienl une irradiation prononcee, et celle qui provenait de la lumiere composee n'avait ni plus ni moins d'eiendue que celle que faisait naitre la lunaiere homogene. » Seulement, bien qu'il y ait un grand nombfe d'annees que j'ai effectue ces experiences, je crois me rappeler qu'en regardant I'appareil projeie sur la lumiere homo- ( 17 ) g6ne, j'^prouvais une certaine gene dans les yeux, comme si les bandes jdifadiation 6taient strides de fines lignes rioires paraliyes'aux cotes des parties opaques, quoique je ne pusse affirmer la presence de ces lignes. Si elies exis- taient en realite, elles fourniraient un argument en faveur de la th^orie qui s'appuie sur la diffraction. Du reste, les personnes qui observaient avec moi ne m'ont rien signal^ de semblable; il est vrai que je ne les ai pas interrogees sur ce point, auquel je n'attachais alors aucune impor- tance. Fliedner fait de m^me la remarque que I'aberration de refrangibilite ne joue, dans I'irradiation, qu'un role tres- secondaire, car, dit-il, les phenom^nes se produisent ega- lement avec une lumiere monochromatique. D'apr^s tout cela, j'ai pen de chose h dire sur la th^orie de Respighi, et encore moins sur celle de Fick. Pour appuyer son opinion, Respighi a fait un grand nombre ' d'observations , mais sa vue pafait n'etre pas tres-bonne, car le croissant lumineux, pen de jours apres la nouvelle lune, se montre h lui comme forme d'un ensemble plus ou moins nombreux d'images imparfaitement superposees. En outre, Respighi ne prend aucune mesure, il juge con- stamment les phenomenes d'apres leur simple aspect, et parfois d'une maniere difficile k comprendre; par exemple, dans le but de montrer I'influence exerc^e sur les aberra- tions, et des lors sur I'irradiation, par les changements de I'ouverture de la pupille, il dit : « Qu'on place sur un fond noir une bande de papier blanc eclairee par la lumiere du soleil, et qu'on I'observe h la distance de 3 ou 4 metres, d'abord avec I'oeil expose a la pleine lumiere du jour, et eons^quemment avec la pupille tres-rcsserree, et Ton trouvera I'objet priv6 ou quasi prive d'irradialion; qu'on (18) I'observe ensuite avec la pupille Ires-dilal^e, en soustrayant I'oeil, au moyen d'un long tube, k la vive lumiere, et Ton verra aussit6t I'objet entoure d'une irradialion tres-seh- sible. » Les personnes douees d'une bonne vue qui ont fait des experiences d'irradiation , specialement en employant des objets blanc sur fond noir, savent qu'il estjimpossible de dis- tinguer la bordure d'irradiation d'avec I'objet lui-m^me; on peut done se demander comment Respighi jugeait, dans la premiere condition de son experience, la bande blanche priv^e ou presque privee d'irradiation. Je m'occuperai plus loin de cette experience , que j'ai fait rep^ter en la variant; elle est, en realite, fort cnrieuse, et les resuitats qu'elle fournit nous seront tres-utiles. Maintenant, puisque I'aberration chromatique n'enlre pas d'une mani6re sensible comme element dans I'irra- diation , a-t-on le droit d'attribuer une influence plus grande k I'aberration de sphericiie? Nous reviendrons d'ailleurs sur I'effet suppose des aberrations de I'oeil en general. Du reste, la theorie de Respighi, celle de Meyer et celle de Fick sont demeurees isoiees, et n'pnl eu, que je sache, aucun adherent. Ce que nous avons dit des theories du premier groupe doit s'entendre egalement de celles du troisieme en ce qui concerne les objets eioignes : supposer une accommoda- tion inexacte , c'est se placer dans le cas des myopes, et consequemment c'est sortir des conditions de mes expe- riences, c'est altribuer les phenomenes a la fausse irradia- tion. Quant aux objets rapproches, pour lesquels les memes auteurs admettent influence des aberrations de I'oeil, nous saurons plus loin a quoi nous en tenir. Mais je dois m'arr^ter un instant sur la theorie de ( 19 ) Cramer. Oa regardera sans doute comnie bien peu pro- bable rhypolhese sur laquelle elle est fondee; je ferai ici la m6me remarque qu'^ regard de la th^orie de Dove : comment croire qu'une bonne vue qui contemple les par- ties lumineuses d'un appareii d'irradiation , n© s'accom- mode pas a leur veritable distance? A la v^rit^, Cramer dtoit une experience k I'appui de son opinion : il a fait voir, dans un M^moire anl6rieur, qu'^ I'etat de repos, les yeux sonl accommodfe pour un tr^s-grand 61oignement. D'apres cela, « si, dit-il, une personne douee d'une vue normale tient les yeux fermfe pendant quelque temps, puis regarde subitement un appareii d'irradiation un peu 61oi- gn6, elle n'aper^oit d'abord presque aucune irradiation , mais celle-ci apparait aussitdt apres. » Cramer ne donne pas de details sur la maniere de pro- c6der; il ne dit ni pendant combien de temps on doit tenir les yeux fermes, ni k quelle distance de I'appareil il.faut se placer, ni s'il convient d'employer un appareii k jour projete sur le ciel ou simplement un appareii blanc et noir. Or j'ai fait essayer I'experience par mon gendre et par mon flls Felix en variant les conditions, et elle ne leur a pas reussi. S'ils n'ont pas op^re convenablement, et si Cramer ne s'est pas tromp^, son experience prouverait seulement que, dans un cell repos6, 1'irradiation exige, pour se deve- lopper, un temps appreciable, quoique fort court. Je dois insister egaleraent sur les passages de YOptique physiologique de Helmholtz qui se rapportent k mes expe- riences d'irradiation, car, k cause du merite Eminent et de la grande reputation de I'auteur, ses opinions ont du se r^pandre et s'accrediter. J'aurai k presenter une critique un peu severe de ces passages; mais, dans un travail si etendu, si riche en fails et en experiences, et qui a exige (20 ) tant de recherches, quelques imperfections sont bien excu- sables. Helmholtz reconnait que les cercles de diffusion qui correspondent a une accommodation exacte, et qu'il attri- bue aux aberrations, sont tr6s-petits, d'oii r^sulte que les bandes d'aberration sont tr^s-etroites, et ii sent le besoin, pour expliquer la plupart des phenom^nes observes, de faire intervenir une accommodation imparfaite : « Les ph^riom^nes, dit-il (i), que Plateau d^crit sous le nom d'irradiation, sont de I'espece de ceux que voit un ceil fai- blement myope sur des objets eloign^s; ce sont done, pour la plupart, des pb^nomenes d'accommodation inexacte. » Je rappellerai, h regard de cette assertion , le passage de mon M^moire cit^ plus haut concernant les personnes qui m'ont aide dans mes experiences : ces personnes n'^taient nullemenl myopes, et leurs yeux s'adaptaient cons^quem- ment avec exactitude aux appareils d'irradiation. J'ajou- terai que moi-m^me, loin d'etre myope, j'^tais plus ou moins presbyte; or mes appareils, placfe bien au delude la limite inf^rieure de ma vision distincte, et consequem- ment h des distances auxquelles ma vue s'accommodait parfailement, me montraieut une irradiation tres-d^ve- loppee. Helmholtz ajoute, toujours en parlant de moi : « Cepen- dant il rejette cette explication, parce qu'il a aussi observe la faible irradiation que pr^sentent des objets tres-eclaires k la distance de la vision distincte, et qu'il ne connaissait pas encore les autres causes de la diffusion dans I'oeil, qui exercent ici leur influence. II s'appuie, de plus, sur ce que, d'apres ses experiences, I'irradiation pr^sentait toujours le (1) Page 442 de la traduction frangaise. ;; ( 21 ) m^me angle pourides objets places k des distances diffe- rentes; cependant ses mensurations ne se rapportent qu'^ des distances de plus de O^jB, c'est-a-dire a des distances dans I'intervalie desquelles I'erreur d'accommodation ne subissait pas de modification sensible. » Ces lignes sont encore la consequence de ropinion de Helmholtz sur mes observateurs; aussi donne-t-ii son approbation au travail de Welcker, « auquel, dit-il, il suffirait d'ajoiiler que les objets tres-petits et tres-eclaires presentent I'irradiation, mSme k la distance de la vision la plus distincle, a cause des autres sortes d'aberrations des rayons dans I'oeil. » Helmholtz, du resle, est lui-meme plus ou moins myope, car il dit que son punctum remotum, c'est-a-dire le point le plus eloigne aiiquel ses yeux puissent s'accommoder, est k la distance de 80 centimetres. Je me demande, d'apres cela , comment il n'a pas fait observer par des personnes douses d'une vue normale, des appareils d'irradiationeloi- gnes de quelques metres, et je fais le meme reproche aux auteurs des theories du premier groupe, ainsi qu'a ceux des auteurs des theories du troisieme qui connaissaient le pou- voir d'accommodation illimite des bonnes vues. Reste la theorie de Powell et d'Andre. Fondle, nous le savons, sur la diffraction au bord de la pupille, elle 6chappe aux difficultes des theories ci-dessus, car elle ne suppose ni I'influence des aberrations de I'ceil , ni aucun degr6 de myopie, et je m'etonne qu'elle paraisse n'avoir pas trouve plus de partisans. Mais il est un fail connu depuis long- temps, qui suffit pour la mettre en donte; on sait que si un objet irradiant est vu a travers une tres-petite ouverture, I'irradiation est diminu^e , et pent m^me devenir insensible. Or, d'une part, la quantite de lumiere penetrant dans I'ceil, et, par suite, I'^clat de I'objet, sont consid^rablement ( 22 ) amoindris par la petitesse de I'ouverture, d'ou doit r^siilter un amoindrisseraent de I'irradiation; mais, d'autre part, les cercles de diffusion dus a la diffraction sont d'autant plus grands que I'ouverture est plus petite; les deux effels opposes devraient done se coinpenser plus ou moins, et cependant on n'observe qu'une diminution de I'irradiation. Toutesces theories, d'aiileurs, viennentseheurter centre les difficult^s naissant de deux fails que j'ai exposes dans mon Memoire. Le premier, qui a beaucoup embarrasse les auteurs de ces memes theories, est celui que j'ai 6nonc6 ainsi : Deux irradiations en regard et suffisamment rappro- ehees, eprouvent I'une et I'autre tine diminution. Cette diminution est d'autant plus considerable que les bords des espaces lumineux d'oii emanent les deux irradiations sont plus voisins. J'ai d^crit, dans les §§ 36 k 40 et 95 de mon Memoire, une suite d'exp^riences curieuses qui ^tablissent ce prin- cipe. Je n'en rappellerai ici qu'une seule, que je choisis parce qu'elle est accompagn6e d'une mesure : I'un de nos observateurs, cliez lequel I'eclat d'un ciel couvert refl^chi par un miroir d^veloppait, quelques instants avant I'exp^- rience, une irradiation de 52", a pu distinguer, a la dis- tance de 3 metres, un fil de eocon projete sur la merae lumi^re et dont la largeur angulaire, a cette distance, n'etait pas d'une seconde. Que sont done devenues, dans ce cas, le long des deux bords du fil, les irradiations deve- loppees paries deux champs lumineux que ce fil s^parait, irradiations qui faisaient'reculer, pour la meme personne, d'une quantity angulaire de 52" le bord d'un objet opaque large? Welcker, qui prend pour de I'irradiation les effets de sa (23) myopie, apres avoir d^crit les apparences que lui presente I'ensemble de deux carres blancs places k une certaine distance I'un de I'autre sur fond noir, ajoute (1) : « II suffit que I'intervalle qui s^pare les deux champs irradiants soit un pen plus etroit, ou que I'objet soil un peu plus 61oign6 ou plus rapproche, pour que cet intervalle dispa- raisse tout k fait, les deux champs irradiants empietant I'un sur I'autre. » Et, plus loin, a propos d'une bande noire etroite sur fond blanc observ^e a une distance plus grande que celle de sa vision distincte : o La bande parait d'un gris sombre d'ailleurs plus la bande etroite s'^largit par I'augmentation de la distance, plus elle se montre lavee, et, au dela d'un certain ^loignement, elle disparait tout k fait. » Ainsi I'experience montre que les bandes de fausse irradiation appartenant k deux objets clairs sur fond sombre, et Ires- voisins, n'exercent pas d'ac- tion notable I'nne sur I'autre, et se recouvrent quand les deux objets sont suffisamment rapproches. Le fait de la neutralisation mutuelle parait done etre une propri^te de la veritable irradiation. Fechner (2) s'exprime comme suit au sujet de cette neutralisation : a Plateau a observe un fait myst^rieux et tres-interessant, qu'on pent verifier sur les figures de son Memoire, savoir que I'extension lumineuse d'un espace blanc s6par6 d'un autre espace blanc par une ligne noire est moindre que si tout cet autre espace elait noir; ainsi, pour me servir de I'expression de Plateau, deux irradia- tions en regard se contrarient. Si ce fait s'accorde mal avec les causes auxquelles j'attribue I'extension lumineuse, (1) Page 33 du Memoire cite de Welclier. (2) Article cite. ( 24 ) il n'est pas mieux d'accord, d'autre part, avec la theorie d'une propagation ondiilatoire de I'excitation sur la retine, attendu que des ondulations qui partentde pointsvoisins, ne se fuient pas les unes ies autres, mais se touchent sans se nuire. » On est en droit de s'^tonner lorsque, en continuant le passage de Helmhollz dont j'ai donn^ plus haul des frag- ments, on trouve, k propos du fait en question : « Plateau est forC^ d'avoir recours & cette proposition pour expliquer pourquoi on pent encore apercevoir un trait noir sur un champ eclaire, lorsque le trait est plus elroit que la lar- geur de I'irradiation ; tout s'explique, au contraire, d'une mani^re simple si Ton admet que I'irradiation provientdes images de diffusion. » Tout s'explique, mais de quelle maniere? C'est en vain qu'on cherche une explication nelte dans toute la partie de I'ouvrage qui concerne les aberrations de I'oeil, les cercles d^ diffusion et I'irradiation; citons le seul passage ou Ton peut trouver une intention de ce genre. Apr6s avoir rappel6 une observation de Volk- mann d'apres laquelle un fd noir tr^s-fin sur fond blane regarde avec. une accommodation exacte parait amplifie comme un fil blanc sur fond noir, Helmhollz ajoute (1) : « De m^me les bandes noires d'une largeur perceptible paraissent aussi plus larges qu'elles ne sont en r^alite, lorsqu'on les examine avec une accommodation assez insuffisante pour que les cercles de diffusion soient beau- coup plus larges que les bandes. » « Du moment que la bande noire n'est plus lres-6troite par rapport h la largeur des images de diffusion, I'intensite diminue peu k peu sur les bords, et ces bords paraissent (1) Page 430 de la traduction frangaise. (23 ) alors gris el confus, taodis que le milieu est noir. On reconnait aussitot la presence des cercles de diCfusion, et I'erreur disparatt. La difference se presente d'une mani^re tres-frappante dans una experience indi- queeparVolkmann. Qu'on examine la figure 135 (fig. 1) a une distance telle que I'accommoda- tion soil tres-defec- tueuse;on trouvera alors que la bande blanche du milieu, dont la largeur est la meme tout du long, pr^sente la forme d'une massue; la partie comprise entre les deux surfaces noires devient large, tandis que la partie situee entre les deux bandes noires devient plus 4troite et reprdsente comme le manche de la massue. La portion blanche situee entre les deux surfaces noires s'^largit par le mode ordinaire de I'irradiation; les deux bandes noires, au contraire, se changent en bandes grises plus larges et empietent ainsi sur la largeur du blanc qui leur est intermediaire. Plateau a d^crit des phenom6nes semhiables, mais il en a conclu que deux bords blancs voisins restreignent r^ciproquement leur irradiation. » Si c'est la une explication, il faut avouer qu'elle est peu intelligible. Du reste, Helmholtz suppose encore ici une accommodation inexacte, et consequemment des condi- tions 6trangeres a mes experiences. D'ailleurs la figure dont il s'agit pr^sente aussi ia forme de massue avec une (26) accommodation exacte, pourvu qu'on I'obserye k une dis- tance sufiQsante : lorsqu'eiie est bien 6clair^e par la simple lumiere du jour, mon gendre, qui jouit d'une bonne vue puisqu'il voit nettement depuis une distance de 15 centi- metres jusqu'^ ceile des astres , apergoit d^j^, A la distance de 2 metres, un 61argissement sensible de la moiti6 infe- rieure de la bande blanche; c'est que, h ceux des bords des bandes noires qui regardent Tinterieur de la figure, les irradiations sont parliellement neutralis^es par celles qui regnent le long des bords ext^rieurs de ces memes bandes, tandis qud 3« long des grarads espaces uoirs les irradiations s'exercent librement. Comment Helmholtz, qui approuve pleinement le tra- vail de Welcker, n'a-t-il pas fait attention aux assertions de ce dernier concernant I'empi^tement muluel des bandes de diffusion et la disparition de la bande noire interm6- diaire? Peut-etre a-t-il ete tromp6 par un examen trop super- ficiel du premier des M^moires de Volkmann que j'ai cit6s en faisant I'enumeration des theories. Dans ce Memoire, en effet, on lit : « D^ja Plateau et Welcker onl appel6 I'attention sur la circonstance frappante, qu'une ligne noire fine sur fond blanc ne disparait point par I'irradiation (1). Des qu'il y a irradiation, c'est-a-dire, en d'autres termes, des que, par suite de la marche de la lumiere dans I'oeil , les cercles de diffusion aux bords du fond blanc empietent sur les limites de I'objet noir, une ligne noire sur fond blanc devrait tou- jours 6tre retr^cie, et raeme disparaitre corapl^tement, (1) Volkmann est dans I'erreur quant k Welcker; ce dernier, a la v6rit6, rappelle mes experiences, mais, ainsi qu'on I'a vu, il n'a pu les realiser, a cause de sa myopia. . ( 27 ) pourvu qu'elle Mt assez miace. Toutefois I'expenence ne r^pond nuUement&celteattentebien fondle; au contraire, la ligne noire se moulre plus large par I'irradiation La loi parait etre celle-ci : Si la largeur de I'image reti- nienne noire est moindre que le rayon des cercles de dif- fusion d'oii nait I'irradiation, le noir eprouve un ^largisse- ment aux d^pens du blanc. b Volkmann demontre d'une maniere ing^nieuse ce fait Fig. 2. d'elargissement; il fait voir qu'^ la limite de deux espaces I'un blanc, I'autre noir, en meme temps que les cercles de diifu- sion apportent de la lumiere en dedans du noir, ils apportent de I'obscurite en dedans du blanc, de fagon que la dimi- nution d'intensite lumineuse commence dans le blanc, k une distance du bord egale au rayon des cercles de diffusion, et que la lumiere s'eiend, dans le noir, jusqu'a une distance 6gale aussi k ce m^me rayon. II admet, pour simplifier, que le d^croissement d'intensite est uni- forme, de sorte que si ab (tig. 2) (1) est, sur la ratine, la ligne limite entre I'image d'un espace blanc et celle d'un espace noir, cd = cf le rayon des cercles de diffusion , et dg une ordonn^e figurant I'iutensite du blanc, la droite oblique gi/'representera le d^croissement d'intensite. D'apr^s cela, si Ton congoit I'image r^tinienne abed (fig. 3) d'une bande noire sur fond blanc plus ^troite que la moitie dies diam^tres fy et hk des cercles de diffusion, les obliques mk et Ig representeront les decroissements d'in- (1) Dans cette figure et dans la suivante, on a exag^re les dimensions pour rintelligence du raisonnement. a- Tlolr / / Blmc. . f c 5 i m s > / i K I / ■i 3 K f C i ( 28)- tensity des deux c6t6s de la bande noire; el I'on voit sans Fig. s. peine que si Ton fait, pour chacun des points de la ligne gk, oii lesbandesde diffusion empietent I'une sur I'autre, la somme des ordonn^es qui figurent les intensites correspondantes, on obtiendra la droite pq, qui montre que la bande noire paraitra 6Iargie et non plus noire, mais d'un gris uni- forme, sauf sur ses bords, ou elle se fondra gradueiiemenl dans le blanc. Mais il resiilte de celte demonstration mcme, qu'elle ne s'appiique pas a mos experiences. En effet, si I'image abed de la bande noire est tres-^troile, si c'est eeile d'une ligne mi»ce, il est visible que la ligne 105 joindra deux points coincidant sensiblement avec les points m et /, et qu'ainsi la ligne noire se sera changee en un espace blanc, ou, en d'autres terraes, aura disparu. Les raisonnements de Volkmann, loin d'expliquer par les cercles de diffusion le maintieu d'un trait noir observe a distance, conduisent done, au contraire, h la m^me con- clusion que les experiences de Welcker, c'est-a-dire a la disparition de ce trait. Respighi fait remarquer que la neutralisation mutuelle de deux irradiations en regard a lieu seulement pour des lumieres faibles ou mod^rees, el qu'avec un eclat conside- rable, comme celui des flammes, les irradiations ne s'in- fluencent nullement. Powell presente une remarque ana- logue. On sail, en effet, depuis Leonard de Vinci, qu'un corps etroit projet6 sur le soleil ne se voil pas; dans cecas, les irradiations sont lellement puissanles, qu'elles franchissenl (29) I'obstacle intermediaire. Je n'ai pas employe les flammes ; mais une experience que je rapporterai bientdt me porte k croire que, m^me avec des flammes, les irradiations en regard se neutraliseraient encore tres-notablement. Respighi constate, &sa mani^re, pour des objets blancs sur fond noir, la neutralisation mutuelle en question, et il essaye d'en rendre raison ainsi qu'il suit, toujours en par- tant de sa theorie, qui attribue I'irradiation uniquement aux aberrations de I'oeil : « II est hors de doute que lorsqu'une portion de la retine a ete pendant quelque temps vivement excit^e par la lumiere, elle devient moins apte a recevoir les impres- sions subsequentes; et, a cause de cela, la sensation dis- lincte exige un degr6 d'^clat plus grand que celui qui est requis dans le cas ou celte portion de I'organe a ^t^ ante- rieurement dans I'etat de repos ou d'obscurit^, ou dans un etat d'excitation faible. Cela pose, quand sur la ratine se formeront deux images tres-voisines, les parties de leurs franges ou bandes d'aberrations intermediaires k ces images, a cause de la mobilite continuelle ^ laquelle I'oeil est sujet, se Iransporteront sur I'espace occupe auparavanl par les images, de sorte que si leur eclat n'est pas tres- intense, elles devront devenir insensibles, et consequem- ment les images ou ne presenteront pas de bandes d'irradiation , ou les presenteront dans des limites tres- elroites. » « L'efTet connu du contraste coutribue aussi a produire ce resultat; par suite de cet effet, la forte impression res- sentie dans les parties de la retine sur lesquelles se forment les images des deux objets, rend moins eflicace I'impres- sion produite dans les parties intermediaires par les bandes d'aberrations. » Je ne pense pas que personne admetle une pareille expli- (30) cation; je ferai seulement remarquer que, si eiie 6lait vraie, eile conviendraifaussi au cas d'un seul objet. Trouessart, qui, du reste, 6nonce mal mon principe, declare n'avoir pu, h cause de sa myopic, r^peter mes experiences; mais il exprime le regret que je n'aie pas dirig^ mes observations sur des flammes ; j'aurais reconnu, selon lui, qiiele rapprochement de celles-ci ne retranchait rien de leurs irradiations individueiles : en plagant les flammes de deux bougies tres-pr6s Tune de I'autre, puis s'en eioignant gradueilement, chacune d'elles s'irradiait, dit-il, absoiument comme si eile elail seule, et elles ne tardaient pas k se confondre en apparence par suite de la superposition des irradiations. Or, Trouessart ^tant myope, ce qu'ii prenait pour de {'irradiation etait en reality les bandes resultant des cercles de difl'usion , bandes qui, nous le Savons, ne se neutralisent pas notableraent. Quant k Fiiedner, Cramer, Meyer, Pick, Dove, Burck- hardt, Ruete, Forbes, Scheffler et Andr^, presque tous client ou commentent mes recherches , mais, soit qu'iis ne les con- naissent qu'imparfaitemenl, soit qu'iis- senfent la difificult6 d'expliquer dans leurs theories le phenomSne de la neu- tralisation des irradiations voisines, ils le passent simple- ment sous silence. Remarquons maintenant que mes eisp^riences sur le sujet donl nous venons de nous occuper, et sp^cialement celle du fil de cocon, montrent egalement que les aberra- tions de I'oeil et la diffraction ne jouent aucun rdle bien appreciable dans I'irradiation. En efl'et, les bandes resultant des aberrations et de la diffraction re doivent pas se neu- tralisermieux parleur voisinage que celles qui proviennent des cercles de difl'usion. Et,acepropos,reprenons, ainsi que jel'ai annonce,rex- pdrience de Respighi consistant a observer, d'abord a roeil ( 31 ) nu,puisa travcrs un long tube noirci, une bande blanche sur fond noir expos^e au soleii. Mon geudre a repute cette experience : une bande de papier bianc de 2 millimetres de largeur et longue d'un decimetre a 6te fixee sur une grande surface de velours noir, el I'ensemble a ete plac^ au soleii; I'observateur s'est eloigne de 3 metres, et a regard^ ia bande avec I'oeil d^couvert, pour juger de sa largeur appa- rente dans cette condition; puis il I'a regardee de nouveau k travers un tube noirci inlerieurement, large de 4 centi- metres et long de 40, et la bande lui a paru considerable- meut elargie, comme I'avance Respighi. Je me suis demande alors s'il fallail altribuer cet effet a rirradiation, ou s'il ne dependait pas de ce que, en regar- dant par le tube, on se faisait illusion sur la distance de I'objet. Pour le savoir, j'ai fait substituer k la bande blanche sur fond noir une bande noire de memes dimensions sur fond blanc. S'il y avai-l illusion sur la distance, cette der- niere bande vue h travers le tube aurait du paraitre ^gale- lement elargie; or elle a paru, au contraire, de beaucoup r^trecie. Le phenomene etait done bien de I'irradialion;' mais cette irradiation provenaitelle, comme le veut Res- pighi, des aberrations de I'oeil? Rien qu'une reponse nega- tive ne flit pas douteuse pour moi, je I'ai rendue evidente par le moyen suivant : j'ai fait tracer sur le fond blanc, en traits fins de quelques centimetres de longueur, les pro- longements des grands c6tes de la bande noire. Alors, en se servant du tube, mon gendre a vu parfaitement ces traits, mais la bande noire lui paraissail tres-notablement plus etroite que I'intervalle de ces memes trails. Des lors 11 n'etait guere possible de chercher soil dans les aberrations de I'oeil, soil dans la diffraction, soil dans une accommo- dation inexacte, la cause du r^lr^cissement apparent de la bande noire, car les irradiations le long des bords de ( 32 )- celle-ci ^taient bien plus que suffisantes pour recouvrir entierement Ics Iraits nqirs^si elles s'etaient produites aussi des denx cotes de chacun de ces derniers. Comma les traits noirs demeuraient bien visibles tandis que de fortes irradiations empietaient sur ia bande noire, I'experience que nous venons de decrire offre un nouvel exemple de la neutralisation mutueile des irradiations en regard; elle n'esl, du reste, qu'une variante de celles de mon M^raoire. Ajoutons qu'elle acheve de prouver I'inad- missibiiit^ des theories de Dove et de Cramer. Si I'irradialion est beaucoup plus developp^e quand on emploie le tube, cela tient k ce qu'alors la pupille 6tant plus ouverte, I'^ciat de i'objet se montre fortement aug- ment^; en outre, quand i'oeil est d^couvert, I'^clairement de la retine par la lumiere qui traverse les paupieres et par celle que la pupille revolt de c6te, nuit a I'irradiation, tandis que le tube, en excluant celte lumiere etrangere, laisse a I'irradiation toute sa liberie. Enfin, quand on fait usage du tube, I'^clat est si consi- •d^rable, que je ne doute pas qu'il ne puisse ^tre compart a celui des flammes vues la null, et puisque la neutralisa- tion s'effectuait parfailement le long des traits noirs, j'en infere comme tr6s-probable qu'elle s'effectuerait de meme, pour une bonne vue, avee des flammes. On peut, semble-t-il, conclure de la discussion qui pr6- c^de, que le phenomene de la neutralisation mutueile de deux irradiations voisines suffirait k lui seul pour faire abandonner toutes les theories que nous avons examinees. (A continuer.) SUR UNE LOI DE LA PERSISTANCE IMPRESSIONS DANS L'ffilL; PAB _ ■ ; ]M. J. I»L,A.TBAXJ. UBMDRB DE l'aCAU^MIF. HOVILE DK3 SCIKNcGS 1) R BRLGIQUE. BRUXELLES, F. HAYBZ, IMPniMliUR DE I,'aCAD|5s1:E ROVALE DE BELGIQUE. 1878 SUR UNE LOI DE LA PERSISTANCE DES IMPRESSIOINS DANS L'ffilL; FAR ■yi. J. PLA.TEAU, HBMBRE DU l'aCAD^UIB UUYILE DBS SClENCIi^ UB BBLUl(jUU. Ci BRUXELLES, p. HAVEZ, IMPRIMEUR DE l'aCAD^MIE KOYALE DE BELGIQHE. 1878 Extrail des Bulletins de V Academic royale de Belgique, ameserie,!. XLVI, n" 9 el 10; 1878. SUR UNE LOI DE LA PERSISTANCE DES IMPRESSIONS DANS UOEIL. § 1. Ma Dissertation (1) coinposee pour Tobtenlion du grade de Docteur en sciences, dissertation qui a surtout pour objet I'^tude de la persistance des impressions sur la retine, n'a ^t6 imprim^e qu'jt un petit nombre d'exem- piaires; k la verite, elle a ete traduile in extenso en alie- mand dans le tome XX des Annales de Poggendorff , et M. Helmhollz en a rappele les principaux r^sultats danssa Physiologische Optik, ouvrage dont on a une traduction franQaise; mais ce dernier ouvrage contient des erreurs graves a I'egard des resultals en question. Ces memes r(5sultats, ainsi que mes procedes, sont done peu connus, du moins hors de I'Allemagne, on le sont d'une maniere inexacte; or, comme iis tendent a preciser davantage nos connaissances sur un phenomene qui a regu de si nom- breuses applications, je ne crois pas inutile de les repro- duire aussi succinctement que possible, avant d'aborder le sujet principal de cette Note. § 2. Pour evaluer la dur^e des impressions, j'ai fait usage, en la corrigeant, de la melhode imaginee par Segner (2), et employee de nouveau plus tard par (1) Dissertation sur quelques proprieles des impressions produiles par la lumieresur Vorgane de la vue, Liege, 1829. (2) De raritale tuminis, GoUingen, 1740, pp. 3 a 8. (4) (I'Arcy (1). Telle que je I'ai modifite, ellexonsisle k faire tourner circulairement I'objet qui produit I'impression, avec la plus petite vitesse pour laquelle I'antieau apparent d^veloppe par celte rotation ne pr&ente plus d'interrup- tion neltement accusee. On comprend , en effel, que cette condition sera remplie si I'objet retrouve , en chaque point de sa course, I'impression engendr^e par son passage pre- cedent, au moment ou elle va s'evanouir, et qu'alors, si Ton lient compte de la largeur de I'objet, la duree d'une revolution fera connaitre celle de I'impression. En indi- quant que I'anneau apparent ne doit plus presenter d'in- terruplion nettement accusee, je n'entends pas dire que sa leinte doive paraitre uniforme; car si Ton augmentail assez la vitesse pour r&liser ce dernier effet, il est clair qu'en chaque point de sa course, I'objet retrouverait I'im- pression ant^rieure non lorsqu'elle est sur le point de s'an- nuler, mais lorsqu'elle conserve encore sensiblemenl loute rintensil6 qu'elle possedait. § 3. Mon appareil etait, comme celui de d'Arcy, un sys- teme de roues verticales m(i par un poids , et tel que la derniere roue pouvait acqu^rir une vitesse considerable, celle du poids ^lant tres-petite. L'axe de cette roue portait une aiguille termin^e par une pince dans laquelle on assu- jettissait I'objet (2). En augmentant ou diminuant le poids, on pouvait donner k I'aiguille tous les degres de vitesse n^cessaires, et son mouvement, qui dans les premiers in- stants, etait accei^re, devenait bientdt uniforme; I'appa- reil etait muni d'un volant k palettes, pour en regulariser la marche; enfin il ^lait place a quelque distance en face (1) Mim.de VAcad. des sciences de Paris, 1765. (2) D'apres mes souvenirs, celte aiguille avail, Si partir de l'axe, 7 4 8 centimetres de loneueur. (5) d'une fenetre, el de telle mauiere que I'axe de I'aiguille ful a la hauleur de raon ceil. J'avais trace, sur la corde qui portail le poids, des traits h I'encre laissant enlre eux des intervalles de 20 centime- tres, et j'etais averti que le mouvement ne s'acc6l6rait plus, lorsque I'un de ces intervalles et le suivant empioyaient le meme temps a passer pres d'un repere fixe ; c'est alors seu- lement queje commeuQaisune observation. Pourconnaitre la dur^e d'une revolution de I'aiguille, il suffisait de laisser I'instrumenl se mouvoir pendant un temps determine, de compter le nombre des tours decrits par Tune des pre- mieres roues , et d'en deduire ensuite , d'apres les nom- bres des dents des roues et des pignons, celui des revolu- tions de la derniere. § 4. II semble, au premier abord, qu'a I'aide de cet instrument, rien n'esl plus facile que d'evaluer la duree d'une impression; cependant, ainsi qu'on va le voir, I'expe- rience presente des difficultes reelles. En premier lieu, les impressions, on le sail, ne passent pas subitement a une nullity absolue; apres la disparilion de I'objet, elles decroissent par degres, de sorte qu'il est impossible de saisir avec precision I'instant oii elles s'eva- nouissent : lorsqu'on attache a la pince de I'aiguille un petit morceau de papier blanc, el qu'on lui donne un mon- vemenl trop pen rapide pour produire I'apparence d'un anneau entier, I'objet parait s'allonger de maniere a oc- cuperi'un plus grand espace sur la circonf^rence qu'il decrit, et rextremil(5 posterieure de cette image allongee, au lieu d'etre nettement termin^e, comme cela arriverait si I'impression s'evanouissait brnsquemenl, se confond au contraire graduellement avec le fond sur lequel elle se projelle. II suit de la qu'on doit renoncer a I'espoir d'ob- tenir des mesures precises. ( 6 ) En deuxieme lieu , de celte premiere difficuW en iiait line autre : I'objetqui se meut circulairement retrouvant, en chaqne point de sa course, I'impression prec^dente tres- affaiblie,chacun des points de I'anneau apparent pr6sente une succession continuelle de teintes vives et faii)ies; de !a un papillotage qui fatigue Foeil , et rend a pen pres im- possible la determination de la vitesse exacie a donner a I'objet. En troisieme lieu, de m^me qu'il fauf un certain temps pour qu'nnc impression une fois forraee disparaisse com- pl^tement, de m^me aussi un certain temps est n^cessaire, on le sait encore, h sa formation complete. II s'ensuil que I'objet en mouvement peut ne produire qu'une impression imparfaite, et, dans ce cas, la dur^e de cette impression deduite de celle d'une revolution est probablement moindre que la duree de I'irapression complete du memeobjet. § 3. J'ai t&che d'attenuer I'influencc de ces trois difli^ cultes. Pour obvier autant que possible k la premiere, j'ai install^ derriere I'aiguille un carton reconvert de velours noir, conime offrant la teinte I9 plus foncee qu'on puisse obtenir, et consequemment comme propre a faire ressortir le mieux les dernieres nuances des impressions. Quant a la seconde difficulte, le seul moyen que j'aie pu employer a ele de repeter chaque experience un assez grand nombre de fois, et de prendre la moyenne des resultats. On peut ecarter en grande partie, et peut-fitre enliere- ment, la troisieme difficulte; il suffit, pour cela, de donner h I'objet une largeur considerable, de lui faire occuper, par exemple, un quart de la circonference qu'il doit parcourir. Mais alors, pour avoir la duree de I'impression, il faut evi- demment soustraire de celle d'une revolution le temps qui s'ecoule entre le passage d'une des extr^mites de I'objet en un point de la course de celui-ci et le passage, C7) au m^me point, de rextremite opposee; ainsi , lorsque I'objet occupe angulairement un quart de la circonference, la duree de I'impression est egale aux trois quarts de celle d'une revolution. De 1^ deux avantages : d'abord I'objet, a cause de sa largeur, met un certain temps k passer devant I'oeil , de sorte que I'impression engendree doit approcher d'etre compl^tei; en second lieu, la duree d'une revolution surpassant notablement celle de I'impression, la vitesse est moindre que s'il s'agissait d'un objet etroit , la succes- sion des nuances vives et faibles est moins rapide, el I'oeil moins ebloui pent reconnailre avec moins d'incertitude quand on doit cesser de modifier la vitesse. Ajoutons que, dans ces experiences, il faut tenir le regard fix6 sur un meme point de I'anneau apparent. § 6. Les objets sur lesquels j'ai opere etaient des bandes de papier 6pais (fig. 1) terminees par deux arcs de cercle ajant leurs centres surl'axe de I'aiguille, elpar deux por- Fig. 1. tions de rayons f'ai- sanlenlre elles un anglcdroit. J'ai em- ploye successive- ineutquatre deces bandes, la premiere laissee blanche, et les autres colorees respectivement en jaune, en rouge et en bleu. J'ai fail, surchacune d'elles,six essais,et j'ai Irouve, pour la duree d'une impression, les valeurs moyennes suivantes : Blanc. 0",ob Jaune. . 0",35 Rouge . . 0",34 Bleu . 0",32 Les ecarts des valeurs parlielles etaient assez peu conbi- (8) derables ; le plus elev6 s'est montr<5 h I'egard du'bleu, pomr lequel la plus grande el la plus petite valeur onl ele 0",36 el 0",30. Telles etaient done approxinialivement les durees lo- tales des impressions produiles dans mon ceil par des objels blancs, jaunes, rouges et bleus bien Mairfe par la simple lumiere du jour. II est singulier que les differences soient si faibles enlre ces valeurs, qui correspondent k des leintes et k des inlensites lumineuses Ires-diverses. II ne faut pas oublier, du resle, que les determinations de ce genre sont entour^es de trop de diflScull^s pour qu'on puisse leur altribuer one entiere conflance. § 7. Signalons ici une l^gere erreur de M. Helmhollz, et une autre beaucoup plus grave de la traduction frangaise de son Oplique physiologique. M. Helmhollz appelle I'altention sur la difficulte d'eva- luer le temps pendant lequel I'impression persislanle s'af- faiblit progressivement avant de disparaitre lout a fail; puis la traduction fran^aise continue ainsi : «. Plateau a fait aussi, sous ce rapport, avec ses disques chromaliques, des experiences qui donnaient le temps du passage d'un sec- teur noir, lorsque la couleur des secteurs clairs s'^tait r^- pandue de maniere que le noir en fill uniformement atlere. » On a vu precedemment que, pour mesurer la duree tolale des impressions, je n'ai pas employe de disques parlag^s en secteurs allernalivement noirs et blancs ou noirs et co- lorfo; on a vu aussi que, dans mes experiences, je n'ai nullemenl fait en sorte que le noir fill uniformement al- tere par la couleur de I'objel ; c'est, au contraire, en ne per- mettant pas k cetle uniformite de se produire que j'ai pu determiner approximativement la duree totale en ques- tion; les derniers mols du passage fran?ais otenl done a ( 9) tnes experiences leur caractere essentiel; mais, dans le lexle allemand, il y a : « de maniere que nuUe part on ne vit plus de noir pur {so dass das Schwarz nirgends mehr rein erschien) », ce qui est bien different, et ce qui est exact. § 8. J'ai dit que par i'emploi de mes bandes arquees, les impressions engendrees devaient approcher d'etre com- pletes. Essayons dejustifier cette assertion. M. Briicke (1) a tache d'^valuer le temps necessaire pour que, dans des conditions donnees, une impression atteignit son maximum d'intensit6, ou, en d'autres termes, devint complete : il ob- servait un disque tournant partage en deux moities I'une blanche, I'autre noire; il lui donnait d'abord une vitesse suffisanle pour amener un gris uniforme; puis il raienlis- sait par degr^s le mouvement, de maniere a obtenir un papillotage de plus en plus prononce, el lorsque, dans la succession rapide des teintes claires et sombres en un meme point, les premieres lui paraissaient d'un blanc pur, il d^terminait la duree du passage de la portion blanche, duree qui, on le comprend, constituait le temps cherche. II a trouve, pdr ce procede, que, dans le cas d'un papier blanc eclaire par le jour d'une apres-midi un pen sombre de Janvier, le temps en question etait, pour son oeil, de 0",186. Un pen plus tard , M. Exner (2), par une m^thode plus precise et extremement ing^nieuse, mais qu'il nous serait difficile d'exfipser ici sans de longs developpements, a (1) Ueber den Nutzeffect intermittirender Netzhautreizungen (Bdllet. DE l'Acad. de Vienne, 1864, t. XLIX, 2" partie, p. 128; voir p. 132). (2) Ueber die zu einer Gesichtswahrnehmvng nOlMge Zeit (Ibid., 1868, t. LVIII, 2" parlie, p. 601). ( 10) mesur^ ce temps dans le cas d'un papier blattc eclaire par la lumiere du gaz, et I'a trouv6 egal, pour son oeil.ili 0",166. II a conslate, en outre, que ce meme temps est d'autant plus court que I'eclairement de I'objet est plus intense. Rappelons maintenanl que mes experiences ont el^ effectuees k la pleine lumiere du jour, et Ton peut admettre, je pense, que cet eclairement est sup6rieur a celui d'un bee de gaz place S une distance moderdede I'objet. D'apres cela, et en vertu de la loi de M. Exner, le temps n^ces- saire pour que I'impression produile par le passage de ma bande arqu^e blanche fut complete, devait etre, en sup- posant une m^me sensibiiile de nos yeux, moindre que 0",166; or la duree de ce passage 6tait de 0",H7; il est done probable qu'elle s'^loignait peu de celie qui corres- pondrait k une impression complete. II est possible cepen- dant que la largeur angulaire de ma bande arqu6e ne fijt pas tout a fait suffisante; et, dans ce cas, le nombre0",35, quej'ai donne comme representant la duree totalede I'im- pression du blanc, serait un peu trop petit. Du reste, la duree de I'impression n'a rien d'absolu; elie varie avec i'^clat de I'objet et avec la duree de la contemplation, el elle doit varier, en outre, avec las diffe- renls yeux; la valeur 0",35 n'esi done relative qu'& I'eclai- rement produit par la lumiere du jour, k une contem- plation de 0",H7, et k mes yeux. § 9. Remarquons actuellement que, dans les nombreuses applications qu'on a faites de la persistance des impres- sions, ce n'est pas la duree tolale qu'on utilise, mais seule- ment le temps pendant lequel, apres la disparition de I'ob- jet , I'impression conserve une intensity sensiblemenl conslante, ou, plus exactement, pendant lequel le d^crois- sement de I'impression est trop laible pour ^Ire percju. Or ( a ) ce temps peut ^tre mesure avec precision , comma on va le voir. Si i'on fait tourner rapidemenl dans son plan et autour de son centre iin disque partage en secteiirs aiternative- ment blancs et noirs, ies premiers egaux entre eiix ainsi que Ies seconds, le rapport des largeurs angulaires d'un secleur blanc et d'un secteur noir ^tant d'ailleurs qiiel- conque, I'apparence est, nous le savons, celle d'une teinte grise uniforme. Nous savons encore que si Ton diminue suffisamment la vitesse, on observe un papillotage. Dans ce cas, si Ton rend k la vitesse de pctits accroissements successifs, le papillotage devienl de moins en moins pro- nonce, puis s'efface enlifirement, et la vitesse pour laquelle I'unifofmite recommence a se montrer, est nettement determinable. Or examinons ce qui se passe lorsqn'on a atteint le point dont il s'agit, c'est-a-dire lorsque la vitesse est pre- cis6ment celle qui correspond a la naissance de I'unifor- mite de teinte. El d'abord, de ce que cette teinte est grise el non blanche, il resulte qii'elle est due a une impression incomplete, Ies secteurs blancs passant Irop rapidemenl devant I'ceil. En second lieu, il suit de I'uniformite de la teinte que, pendant le passage d'un secteur noir devant I'oeil, la perte eprouv^e par ['impression du gris en ques- tion n'est pas appreciable a ia viie. II faut done nedessairement admeltre, comme le fait observer M. Exner dans un second Memoire(l) sur lequel je reviendrai plus loin, que, lors de la vitesse precise oii commence I'uniformite, Taction de chaque secteur blanc (1) Bemerkungen Uber intermittirende Nelzhautrefzung (Archiv. be Pfluger, 1870, o" annee, p. 21 i). (12 ) repare exactemenl la petite perte que I'impression avait subie pendant le passage du secleur noir pr^cSdenl; de celte faQon, en effet, I'oeil ne pent plus percevoir de varia- tions dans la teinte. D'apres cela, connaissant la dur^e d'une revolution du disque et la largeur angulaire des secteurs noirs, on en deduira la duree du passage de I'un de ceux-ci, et cette duree sera le temps pendant lequel I'innpression grise se maintient sans decroissement appreciable. Pour abr^ger le langage, je nommerai ce temps le temps de Constance apparente de I'impression. § 10. Ainsi que je I'ai rapport^ dans ma dissertation, j'ai mesure, pour mes yeux, dans un cas determine, le temps donl il s'agit. A cet effet, j'ai partag^ quatre disques chacun en 24 secteurs egaux alternativement clairs et noirs; les secteurs clairs etaient blancs sur le premier disque, jaunes sur le second, rouges sur le troisi^me et bleus sur le quatrieme; j'ai fait tourner successivement ces disques avec les vitesses respectives pr^cisement cor- respondantes a la naissance de I'uniformite de teinte, et j'ai obtenu les nombres suivanls qui expriment, pour chaque disque, la duree d'une revolution; chacun d'eux est la moyenne de quatre mesures isolees; les experiences out ^le laites a la simple lumifere du jour. Blanc 0';i91 Jaune 0';i99 Rouge 0'j232 Bleu 0';29b Pour avoir le temps pendant lequel les iiApressions de ces couleurs se maintenaient sensiblement constantes dans mes yeux, il suffit done de diviser par 24 les nombres ci- ( 43) dessus, ce qui donne, pour le blanc par exemple, 0",00'79. Tel ^tait done, pour mes yeux, et sous reclairement de la lumiere du jour, le temps de Constance apparenle de I'im- pression blanche incomplete produite par le disque en question; I'^clat, c'est-a-dire I'intensite lumineuse de la teinte uniforme que montrail ce disque, 6tait, en vertu de la loi de Talbot, la moiti^ de celui des secleurs blancs au repos. Je dois, au sujel de ces experiences, rectifier plusieurs erreurs ^chappees k M. Helmholtz. A la page 453 de la traduction fran^aise de VOptique physiologique , je Irouve ce qui suit : « Plateau fit tourner, k la lumiere ordinaire du jour, lin disque qui porlait douze secleurs blancs ou colores et douze secteurs noirs, de meme largeur. La duree du pas- sage d'un secteur noir ^taitdonc la vingt-quatrieme parlie de la dur^e de rotation du disque. La dur^e du passage etait, pour que le disque produisit un effet uniforme : » puis viennenl les nombres rapportfe plus haul, savoir 0",191 pour le blanc, etc. ; or, comme je I'ai dit, ces nom- bres expriment non la dur^e du passage d'un intervalle noir, mais celle d'une revolution enti^re du disque. En outre, M. Helmholtz met en parallele avec ces memes nombres les suivants donnas par M. Emsmann : Blanc, 0'j-2S Jaune 0','27 Rouge . . 0';24 Bleu de 0';22 a 0';'29 et, plus loin, il ajoute : a Du reste, les nombres de Pla- teau me paraissent relativement bien grands. » Cette der- niSre opinion est la consequence naturelle de i'erreur que j'ai signal^e; mais, ce qu'il y a de singulier, e'est que M. Helmhollz iie s'aper^oit pas que les nombres de M. Emsmann sont plus grands encore. Et ici nouvelle erreur:on peul concluredu travail de M. Emsmann (1) que les nombres dont il s'agit representenl non la dur6e du passage d'un intervalle noir dans les conditions que j'ai d^linies, mais la dur^e totale de I'impression. Sous ce rap- port, les nombres en question sont plus petits que les miens : pour la duree totale de I'impression du blanc, par exemple, j'ai trouve, on I'a vu, 0",3S; mais, je dois I'avouer, ii m'a 6le impossible de comprendre comment M. Ems- mann dgduit de son procede la dur^e totale de I'impres- sion. § H. Enfin M. Helmhollz dil : « Du resle. Plateau a d6jk remarque que, si Ton change le rapport de largeur des secteurs Wanes et noirs sans changer ieur nombre, la Vitesse n^cessaire pour rendre I'impression uniforme resle la meme. On pent s'en assurer facileraent en empioyant un disque semblable a la figure (2), oft les secteurs noirs sont plus larges au centre, les blancs k la peripheric. Quand on augmenle pen k peu la vitesse de rotation, le papiilolage disparait a peu prte simullan6menl sur toules les parties du disque. » Or la remarque que j'ai r^ellci- ment ^noric^e, n'a pas la g^n^ralit^ de celle que m'attribue M. Helmhollz; voici ce que j'ai dit dans ma dissertation : « Divisons deux cercles A et B (fig. 2) en secteurs (1) Ueber die Dauer des Lichteindrucks [Ani^. de Poggendorff, ISSli t. XCI, p. 611). (2) C'esl UD disque poi'lant Irois zones concenlriques donl chacune est form^e de portions de secleurs ailernalivement l)lanehes et noires com- prises entre deux circonf6rences. ( 15 ) blancs et noirs; que ces secteurs soient en meme nombre dans les deux cercles, mais donnous aux secteurs blancs du premier peu de largeur relativement aux intervalles qui les s^parent, et faisons le contraire dans le second, de telle maniere que les secteurs blancs du premier soient egaux aux intervalles noirs du second, et vice-versa. Fai- sons-les tourner successivementavecla vitesse prdcis^ment necessaire a la production d'une teinte uniforme, et mesu- rons pour chacun d'eux la duree d'une revolution ; nous trouverons toujours ces deux dur^es 6gales entre elles, quelle que soit la difference entre les largeurs des secteurs de I'un et de I'autre cercle. » Fig. 2. Ainsi ma remarque s'applique uniquemenl au cas oi!i il n'y aurait, sur le disque de M. Helmholtz,que deux zones, et oi!i celles-ci seraient telles que les secteurs blancs de I'une fussent ^gaux en largeur angulaire aux secteurs noirs de I'autre. II est aise de voir, h priori, que la loi telle que r^nonce ( 16 ) M. Helmhollz ne peul ^tre qu'approximative. On coriQoit, en effet,que si, le nombre des secleurs demeiirant le ni^me, on r^lrecit soil les secleurs biancs, soil les noirs, jusqu'^ les reduire h de simples traits, il ne faudra qii'une vitesse de rotation relativement irSs-pelite pour les eflfacer enti^remenl el faire disparailre toute trace de papillotage. L'exp^rience confirme d'aiileurs cette provision : si Ton construitundisquepor- tant deux zones form^es chacune dum^me nom- bre de secleurs, mais dans I'une desquelies les secleurs biancs sont egaux aux noirs, tandis que dans I'autre les sec- leurs biancs sont suffl- sammenl ^Iroits rela- tivement aux noirs , on conslale, en le faisanl tourner, que lorsqu'on alteint la vitesse qui annule tout papillotage dans la seconde de ces zones, il est encore tr^s-nolable dans la premiere. L'effet est dej^ bien sensible avec un disque tel que celui de la fig. 3 , dans la zone ext^rieure duquel les secleurs biancs ont, en largeur angulaire, le huiti^me de la somme des largeurs d'un secteur blanc el d'un noir, el il est d'autant plus prononce que les secleurs biancs sont plus ^Iroits. § 12. J'ai pris recemmonl, k eel ^gard, des mesures dont je vais rendre comple. Je ne possede plus I'appareil k rouages el k poids qui m'a servi pour les experiences de ma dissertation ; j'ai done 61^ oblig^ de me contenler d'un HI ) instrument a poulies et a manivelle, instrument avec lequel il est difiicile de r^aliser une vitesse bien uniforme. J'ai pare, autant que possible, k cet inconvenient en faisant r6p6ter I'exp^rience un assez grand nombre de fois pour chacune des zones k observer, et prenant la moyenne des r^sultats; ceux-ci, du reste, n'ont pas ^t& assez discordants pour qu'on ne vit sortir netlement de leurs moyennes le fait qu'il s'agissait de constater. L'instrumenl etait place en face d'une fen^tre exposee au Sud; les experiences ont ele efifectuees en mai, juin et juiliet, de 3 a 4 heures apres- midi, par des jours ciairs. Pour que I'observateur reconnaisse bien la vitesse pour laquelle s'evanouit, dans une zone d^terminee, la derniere trace de papillotage, il doit regarder de pres; si done il n'est pas myope, il doit armer ses yeux de lunettes con- vexes, de maniere que la distance k laquelle il voit alors tout a fait nettement soit d'une viiigtaine de centimetres; dans ces conditions, on juge parfaitement du papillotage et de sa disparition. Les personnes qui ont observe pour moi 6taient mon gendre M. Van der Mensbrugghe, et mon fils Felix. Je tenais appliquee conlre mon oreille une monlre battant les cinquiemes de seconde, pendant que I'observateur cher- chait par latonnements la vitesse requise; lorsqu'il jugeait I'avoir atteinle, il pronon^ait un premier tope, puis l^chait de maintenir la meme vitesse en effectuant vingt lours de la manivelle, et pronon^ait un second tope au moment ou il lerminait le dernier lour; entin je lui indiquais le nom- bre de secondes que j'avais compte durant cet inlervalle, et il I'annotait. J'ajoute que mes disques avaient 16 centi- metres de diametre, que chacun d'eux conlenait deux zones de secteurs ou plut6t de portions de secteurs alternative- 2 (18) ment blanches et noires, et que chaque zone 6tait formic de huit couples de portions pareilles, c'esl-^-dire, en tout, de seize secteurs blancs et d'autant de secteurs noirs. Voici maintenant les r^suitats obtenus. Je nomme valeurs relatives de I'^clat les nombres qui expriment, pour chaque zone observte, le rapport entre la largeur angu- laire d'un secteur blanc et la somme de celies d'un blanc et d'un noir; ce rapport mesure, en effet, d'apres la loi de Talbot, r^clat de la zone grise produite compared celui du blanc pris pour unite. Ainsi I'^clat f est celui de la zone oil les secteurs blancs sent ^gaux en largeur aux noirs, I'Mat I est celui de la zone ofi la largeur des secteurs blancs est le septieme de celle des noirs, etc. En regard de chacune de ces valeurs j'ai plac6 le nombre correspondant de secondes dcoul6 pendant vingt tours de la manivelle. Observations de mon gendre. Valeurs relatives de I'eclat. Mombres de secondes. I 12';2 I ■ • •. 14,6 r, 16,2 35 18,5 fo 23,1. Observations de mon fits. Valeurs relatives de 1' eclat. Nombres de secondei i ■ ■ • • 14';i r 15,7 n 16,3 Ti 17,4 k 19,8. ( 19) Chacun des nombres de secondes est la moyenne de vingt mesures isolees. Comnie on devait s'y attendre dans de semblables experiences, ces mesures on I prdsente des ecarts assez considerables, dus en partie k la nature de rinstrument employ^, en partie k ce que les observations relatives h une meme valeur de I'^clat n'ont pas et^ faites le meme jour, et que la sensibility des yeux varie. Les series qui, dans les observations de mon gendre, offraient les plus grands ecarts, ^talent celles relatives k I'eclat I et a I'eclat ^ ; les nombres extremes dtaient, dans la premiere, 9",4 et 14", 6, et, dans la seconde', d2",6 el 22",0. Pour savoir quel degr^ de coutiance on pouvait, malgre ces ecarts oxcessifs, accorder aux moyennes, j'ai prie mon gendre, qui avait alors acquis plus d'habilude, de faire, pour c^B|h||M|||k|ls, deux nouvelles series, et, dans celles-ci, '{[^^^^^V^^^' ^^ 'i^^^, beaucoup moin- djres ; or les moyenne^i^es nouvelles series coincident sensiblement avec les moyennes des anciennes : en les arretant k la premiere decimale, ce qui suffit 6videmment, la difference est nulle pour I'une d'elles, et ne s'eleve, pour I'autre, qn'a 0",2. Enfin, on a pris separement, dans cha- que serie, la moyenne des dix premiers nombres et la moyenne des dix autres, et les differences entre ces moyennes partielles et les moyennes g(5neraies correspon- danles ont 6te, pour toutes les series, moindres que 0,"5. J'ai conciu de tout cela que la moyenne de vingt mesures devait etre Ires-approchee de la verite. A regard de mon fils, j'ai suivi une marche un peu ilifferenle. J'avais reconnu que, cbez lui, les nombres variaicnt beaucoup, pour une meme valeur de I'eclat, d'un ]our h un autre. Afin d'^carter cette cause d'erreur, mon fils a pris, un premier jour, quatre mesures pour chacune (20) des cinq valeurs de I'^clat, puis, un autre jour, ^galeraeBt quatre mesures pour chaque eclat, un troisiemejour de m^me, jusqu'a un cinquieine; en outre, pour ^viterl'in- fluence possible de la fatigue de la vue pendant une suite de vingt observations, j'ai change chaque fois I'ordre des eclats, et j'engageais d'aiileurs mon fils a laisser de temps a autre reposer ses yeux. Ces observations m'ont donne ainsi, comme celles de mon gendre, vingt mesures pour chacune des valeurs de I'^clat. On le voit, tant dans les r^sultats de mon fils que dans ceux de mon gendre, les nombres de secondes vont en augmentant, et cons^quemment les vitesses vont en dirai- nuant, de T^clat i a I'^clat ~ ; la loi formulae par M. Helm- holtz n'est done qu'approxiraative, ainsi que je I'ai avanc^. § 13. Au contraire, celle que j'ai r^ellement enonc^e, paraitetre rigoureusement exacte. D'apres celte derniere (§ H), pour que les vitesses correspondantes h deux zones differentes contenant le m^me nombre de secleurs soienl tout a fait ^gales, 11 faut que les secteurs noirs de I'une de ces zones aient la meme largeur angulaire que les secteurs blancs de I'autre zone. Je n'avais pas conserve la note des largeurs angulaires relatives des secteurs employes dans les experiences de ma dissertation ; j'ai done voulu m'as- surer de nouveau de I'exactitude de la loi, en portant les choses a I'extrSme : on a d'abord essaye I'efTet de deux zones dans I'une desquelles les secteurs blancs n'avaient, en largeur angulaire, que le 24'"°" des secleurs noirs, tandis que, dans I'autre, c'^taient les secteurs noirs dont la lar- geur angulaire 6tait le 24"""° de celle des secteurs blancs. Ces deux zones se trouvaient cons^quemment dans les conditions de ma loi; or, en faisant tourner le disque, mes ( 21 ) deux observateurs n'ont pu apercevoir ia moindre diffe- rence dans les vitesses : quelque graduellement qu'ils aient accelere ou ralentl le mouvemenl, ils voyaient le papillo- tage disparaitre ou lenaitre d'une maniere absolument simultanee dans les deux zones. On a essaye ensuite iin autre disque, dans lequel la largeur angulaire des secteurs elroits 6tait la moili6 de la prec^dente, et ie r^sultat a ete identiquement le raeme quant a la disparition et a la reapparition du papillotage. Je ne puis done conserver aucun doute sur I'exaclitude de ma loi. Seulement, pour qu'elle se manifeste ainsi d'une maniere bien nette, il faut que chacun des petits secteurs blancs soil dans le prolon- gemenl du petit secteur noir de I'autre zone; il faut, en outre, donner le plus grand soin a la parfaite egalite des largeurs angulaires de tons ces secteurs. § 14. Examinons de plus pres cette curieuse loi. Au lieu de deux zones sur un meme disque, supposons, ce qui sera plus simple, deux disques diiferents satisfaisant a la condition de la loi, c'esl-a-dire portant le meme nombre de secteurs, et tels que les secteurs blancs de I'un soient egaux aux secteurs noirs de I'autre. Nous savons que, lorsque chacun de ces disques lournera avec la viiesse precise pour laquelle nait I'uniformite de la teinte grise, les deux vitesses seront exactement egales; nous savons, en outre, qu'alors les temps de Constance apparente de chacune des deux '.impressions grises seront mesur^s par les durees respectives du passage d'un secteur noir en un meme point; et, en vertu de I'egalite des deux vitesses, ces durdes seront entre elles comme les largeurs angulaires respectives des secteurs noirs. Mais, par suite de la condi- tion qui regie la construction de nos disques, ces largeurs sont entre elles en raison inverse de celles des secteurs ( 21 ) blancs, puisqiie elles leur sont r^ciproquement egales; or| en consequence de la loi de Talbot, le rapport de ces^der- ni^res largeurs est aussi celui des eclats des deux teintes uniformes; done ies temps de Constance apparente des deux impressions grises sont entre eux en raison inverse des eclats des teintes qui produisent ces impressions. Remarquons maintenant que ces deux eclats sont com- plementaires I'un de I'autre, c'est-a-dire qu'en Ies ajoutant on aurait I'^clat du blanc : si, par exemple, Ies secteurs blancs de i'un des disques avaient, en largeur angulaire, le huitieme de la somme d'un secleur blanc et d'un noir, Ies secteurs blancs de I'autre disque auraient Ies sept hui- tiemes de la meme somme; I'eclat de la teinte grise du premier serail done le huitieme, et celui de la teinte grise du second Ies sept buitiemes de I'^cIat du blanc, § 15. Nous pouvons, d'apr^s Ies mesures du § 12, determiner Ies temps de Constance apparente correspon- dants, pour mon gendre et pour mon fils, aux diff^rentes valeurs de I'^clat. Rappelonsnous de nouveau que, dans chaque cas, ce temps est mesur6 par la dur^e du passage d'un secteur noir en un m^me point. Or, dans inon in- strument, vingt tours de la nianivelle en produisent 94,6 du disque; sacbant, de plus, que, dans cbaque zone de celuici, il y a huit secteurs blancs et buit noirs, et connaissant le rapport des largeurs angulaires des premiers el des seconds, il est aise de calculer, dans Ies differents cas, d'apres le nombre de secondes correspondant aux vingt tours de la manivelle, la dur6e du passage d'un secteur noir, et conse- quemment le temps de Constance apparente de I'impres- sion. Si n designe ce nombre de secondes, la duree d'une revolution du disque sera evidemment g|^,etcelledu pas- sage de I'enserable d'un secteur blanc et d'un noir sera le ( 23 ) huilieme de cetle valeur; enfin si p est le rapport de la largeur angulaire d'un secteur noir a celle de cet ensem- ble, on aura, en repr^sentant par t le temps de Constance apparente. « = 3-^ = ^. Ajoutons que, de la valeur de t correspondante a un telat determine, on deduit imm^diatement celle qui cor- respond a racial complementaire : par exemple, pour I'eclat ^, le secteur noir a, en largeur angulaire, les |f de la somme des iargeurs d'un secteur blanc et d'un noir, de sorte que p est egal ^ |f ; or, pour I'eclat complementaire H, on a p = ~\ et comme, en vertu de notre loi, le nombre n de secondes est le m6me des deux parts, il suffira de diyiser par 49 la premiere valeur de t pour passer a la seconde. D'apres cela, nous formerons, au moyen des resultats du § 12, les deux tableaux suivants; j'ai plac6, dans une troisieme colonne, les valeurs relatives de t, en prenant comme unite la valeur correspondante a I'eclat \ , atin qu'on put mieux voir comment varient les temps de Constance apparente. D'apris les resultats de moii gendre. Valeurs relatives dc I'eclat Valeurs absolues de (. Valeurs relatives de t . 0';0299 3,69 . . . 0,0232 . . . 2,86 0,0201 .... 2,48 . 0,0169 .... 2,09 . . 0,0081 . . . . 1,00 . 0,0024 . . 0,30 . . . 0,0013 . . . . 0,16 0,0010 0,0006 0,12 0,07. (M) D'apres les resultats de mon fits. Valeurs relatives de I' eclat. Valeurs absolues de (. Valeurs relatives de (. ^ 0"0256 .... 2,7S -± 0,0221 . . 2,58 i 0,0203 . . . . 2,18 ; i. . . . . . 0,0181 . ' 1,95 1 0,0095 ... . 1,00^ 1 0.0026 . . . 0,28' f; 0,0013 . . . 0,14 f* 0,0009 0,10 is 0,0005 . . . . ■ 0,05. Les nombres de la S"' colonne permettent de represen- ter graphiquement avec facilite la relation entre les va- leurs de t, ou du temps de Constance apparente, et celles de r^clat de la teinte grise. En prenant pour abscisses les valeurs de I'^clat et pour ordonn^es celles de t, on obtient les deux courbes ci-dessous (fig. 4; voir page suiv.), dont la premiere est relative aux yeux de mon gendre, et la seconde a ceux de mon fils. Ces deux courbes, on le voit, sans etre idenliques, sont du meme genre; toutes deux paraissent converger, pour le cas d'un 6clat nul, vers une asymptote, ou du moins vers une valeur tres-grande de t; toutes deux aussi con- vergent vers une valeur nulle de t pour le cas de I'eclat egal k I'unite, c'est-^-djre de I'l^clat du blanc. Les valeurs obtenues par moi d'abord, puis par mon gendre et par mon fils, pour r(5clat^ sous I'^clairement de la pleine lumi^re du jour, savoir 0",0079, 0",0081 , ct 0",0095, sont assez rapprochees, et M. Aubert, qui a cher- ch6, dans les mfimes conditions, la dur^e du passage d'un secteur noir (1) sans se preoccuper de la signification de (1) Physiologie der Netzhaul, Breslau, 1865, Pk^52. (25 ) cette dur^e, a troave, en moyepne, 0",0i , valeur qui ne s'^loigne pas beaucoup des pr^cedentes. M. Emsmann (Note d^j^ cit^e), en employant, comme moi, un disque partage en 24 secteurs egaux allernativement blancs et noirs, a d^duit de ses experiences que, pour lui, la duree d'une revolution devait etre de 0",55, ce qui donne, pour celle du passage d'un secteur noir, 0",0229 , valeur peu inferieure au triple de chacune des ndtres; cela provienl sans doute de la difference des yeux. Fig. 4. ( 26 ) § 16. Arrivons a I'influence de reclairemenl du disque. Dans le passage dont j'ai reproduit plus haul des frag- ments, M. Helmholtz dit : « Si Ton fail tourner un disque cbromalique, a quelques pieds de distance d'une lampe, avec une vitesse precisement suffisante pour produire un efl'et uniforme, pour peu qu'on rapproche la lampe, la sur- face tournante recommence k papilloter. A la lumiere direcle du soleil, il faut employer des vitesses de rotation encore plus considerables Quant a moi, je trouve qu'a la lumiere d'une tres-forte lampe, pour un disque couvert de secteurs noirs et blancs d'egale largeur, le pas- sage d'un secteur noir ne doit pas durer plus de -^ d&se- conde, et qu'il ne doit pas d^passer ^ de seconde pour I'eclairage si faible que donne la pleine lune, quand on veut qu'il ne reste aucun papillotage. » Ainsi, pour M. Helmholtz, en passanwde la lumiere d'une forte lampe a celle de la pleine lune, le temps de Constance apparente de I'impression a ete un peu plus que double. M. Aubert (passage deja cite), en produisant, dans une cbambre ren- due obscure, un ^clairement du meme ordre que celui de la pleine lune, a tronv^ 0",02, c'est-^-dire deux fois autant qu'a la lumiere du jour. Enfin M. Exner (1) avance que si un disque parlag6 en secteurs blancs et noirs tourne avec une vitesse qui laisse encore dislinguer la succession du blanc et du noir, et si, la vitesse ne changeant pas, on diminue I'eclairement, on ne voit plus qu'un papillotage faible, ou meme simplement du gris. II suit de tout cela, que le degr6 d'^clairement a une influence r^elle sur le temps de Constance apparente de (1) Ueber den Erregungsvorgang im Sehnervenapparaie (Bullet, de l'Acad. de ViEfiNE, 1872, 1. LXV, 3™ parlie, p. 39; voir p. 65). ( 27 ) I'impression, et que ce temps augmenle quand I'eclaire- ment diminue. J'ai voiilu soumettre egalement la chose a des mesures; mais^ k ma grande surprise, les resultats se sont montres diff^rents de ceux que je pouvais attendre. Je me suis propose d'abord de comparer les vitesses du disque a la simple lumiere d'un jour clair et sous raclion directe de celle du soleil. Mais comme, dans ce dernier cas, les secleurs peints en noir reflechiraient une quantite tres-notable de lumiere qui pourrait necessiter un amoin- drissement de la vitesse, on a dccoupe ces secteurs a jour, etl'on a dispose I'appareil de maniere qu'il se projelat sur une surface de velours noir, celle-ci etant, bien enlendu, abrit^e des rayons du soleil. Les secteurs blaucs etaient egaux aux secteurs a jour, et il y en avail huit de chaque esp^ce, eomme dans toutes les experiences precedentes; en outre, on avait noirci la zone exterieure aux secteurs, ou, plus exaclement, aux portions de secteurs, et Ton avail noirci egalement I'espace circulaire interieur; si ces par- lies etaient demcurees blanches, leur eclat trop grand sous la lumiere solaire aurail pu eblouir les yeux de I'observa- teur. Or, k la simple lumiere du jour, nion gendre a irouve, comme moyenne de dix mesures Ires-concordantes, et loujours pour vingt lours de la manivelle, 10",9, et, le meme jour, h la lumiere directe du soleil, H",l , ce qui donne, pour les temps de Constance apparenle respectifs, les valeurs 0",0072 {i), et 0",0075. Ainsi, malgre I'exces si considerable de la lumiere solaire sur celle du jour, les (1) Cette valeur est notablement inferieure a celle que le meme obser- vateur avait obtenue auparavant (§§ 12 et 15) pour la meme valeur rela- tive de r^clat et sous le mtoe eclairement; la difference provient sans doulc en grande partle de ce que le noir elait necessairement plus intense dans I'experience acluelle que dans la precedeiite. ( 28 ) deux leraps de Constance apparenle ont et^ sensiblemenl egaux, et le sens de leur legere difference montre que le plus court correspond a reclairement le plus faible. Pour souniettre ce singulier r^sullat k une epreuve de- cisive, on s'est arrange de fag.on que I'une des moities du disque ful au soleil el I'autre moitie a I'ombre; or, dans ces conditions, mon gendre, avec quelque soin qu'il gra- dual la Vitesse, soit en I'acc^l^rant soit en la diminuant, a toujours constat^ que lorsque le papillolage avait disparu dans la moiti^ eclairee, il subsistait encore, quoique faible, dans la moili^ ombr^e. Fallait-il attribuer ce fait inattendu a une disposition anormale des yeux de mon gendre? Afin d'eclaircir mes doutes, j'ai fait r^peler cetle derniere experience par mon fils, et celui-ci a observe iden- tiquement le meme effet : comme mon gendre , il voyait encore un papillotage faible, mais decide, dans la moitie ombree, quand il n'y en avait plus dans la moiti^ Eclairee. Je me suis demande alors ce que j'obtiendrais sous un eclairement tres-reduit. Dans ce but, on a fermeles voleis, et Ton a abaiss6 un store en coton blanc assez epais de- vant le quart sup^rieur de la fenetre, que les volets ne couvraient pas; en outre, on a choisi des jours sans soleil. Dans cette obscurite relative, mon gendre a pris les me- sures correspondantes aux Eclats j^, -^ et ^, I'eclat du blanc, sous le meme Eclairement, etant toujours pris pour unite, et I'on en a deduit, comme pr^cedemment, d'apres ma loi, les valeurs appartenant aux eclats {f et |f . A cause de la longueur de ces experiences et de la fatigue qu'elles occasionnent, on s'est bornE aux trois Eclats ci-dessus, pour cbacun desquels on a effectue 20 mesures. Les obser- vations ont EtE faites en differents jours, par la mEthode suivie k I'egard de mon fils (§ 12), et chaque fois on atten- ;> ( 29 ) dait queique temps avant de les commencer, pour liabituer les yeux an faibfe degr6 de lumiere. Void les resullals : Valeors relatives de I'^clat. Nombres de. secondes. Valeurs absolues de I. Valeurs relalives de t. 27';2 . . o';oss2 . . . 5,14 21,1 . . . . 0,0262 . . 2,34 17,0 . . . 0,0112 . . . . 1,00 21,1 . . . 0,0016 . . 0,14 27,2 . . . . 0,0007 . . . 0,06 En comparant le tableau du § 15, relatif & mon gendre, avec le tableau ci-dessus, on voit que, malgre la grande diminution de I'eclairement, les valeurs absolues de t ne se sonl pas beaucoup ^lev^es : I'accroissement le plus pro- nonc6 correspond & I'eclat | pour lequel , en passant d'un eclairement a I'autre, la valeur de t n'a augmente que dans le rapport de S & 7 a peu pres. M. Helmholtz ayant oper6 d'abord a la lumiere d'une forte lampe, j'etais curieux de savoir si, dans de telles cir- conslances, les resultats seraient modifies. Mon fils, en employant encore un disque dans lequel les secteurs noirs ^taienl egaux aux blancs , a pris dix mesures sous I'eclai- rement d'une bonne lampe an petrole placee k 50 centi- metres du disque, puis dix autres mesures la lampe 6tant a une distance double; il a trouve, en moyenne, dans le premier cas, 17",6, et, dans le second, 18",7, toujours pour 20 tours de la manivelle, ce qui donne les temps de Constance apparente 0",0H6, el 0",0123. Ici done, tandis que I'eclairement a varie de 1 ^ ^ ^ peu pres, les temps de Constance apparente n'ont ete que comme 16 a 17 en- viron. II resulte de cet ensemble d'exp^riences,y compriscelles de M. Helmholtz et de M. Aubert, que pour que le degr6 (30) d'eclairement ait une influence bien prononcee sur la Vitesse k clonner au disque, et, par suite, sur le temps de Constance apparenle de I'impression, il faut, en parlant de la pleine lumiere du jour ou de ceile d'une forte iampe, abaisser i'eclairement a une valeur extreinemenl petite, de raaniere ^ le rendre, par exemple , du meine ordre que celui de la pleine lune. Nos experiences montrent, en outre, qu'au-dessus d'une certaine intensite, I'influence de I'eclai- rement cesse, et meme se renverse, peut-^lre parce qu'alors I'eclat est dejk assez grand pour amener les yeux dans une condition plus ou moins anormale. Si M. Helmliollz a vu le papillotage reparaitre pour une legere augmentation de I'eclairement, c'est que sans doute il avait un instrument qui lui pcrmettait de r^aliser une Vitesse unilorme et pouvant etre gradu6e a volonl^, de faQon a atteindre avec precision et k maintenir celle re- quise pour la simple annulation du papillotage; on com- prend des lors que, pour un petit rapprochement de la Iampe, des traces de papillotage renaissaienl. Ce que dit M. Helmbollz & I'egard de la lumi6re direcle du soleil, n'est point en opposition avec mes r6sultats, car il ne parle de TelTel de ce dernier edairement qu'en compa- raison de celui de la lumiere de la Iampe, et nbn de celui de la lumiere du jour. Mais je ne puis m'expliquei" le fait si prononce decrit par M. Exner qu'en admettant que ce dernier observaleur ne regardait pas d'assez pr6s , ou qu'il a diminue I'eclairement jusqu'^ atteindre presque I'obscu- rite, ou bien enfin que sesyeuxsont essentiellement difl^^- rents de ceux des autres pcrsonnes que j'ai citees. § 17. Ces memes experiences conduisent k d'autres consequences qui me paraissent bien remarquables. Si Ton met en regard les dernieres colonnes des tableaux ( 31 ) des §§ 15 et 16, on voit que la courbe qui representerait, pour mon gendre, la marche des valeurs de t dans une lumi^re Ires-faibie, differe peu de celle qui se rapporte k la pleine lumi^re du jour, bien qu'elle ne lui soil pas tout k fait identique: elle montrerait ^galement que le temps de Constance apparente converge vers rinfini ou vers une valeur tres-grande pour un eclat nul, et vers z^ro pour r<^clat complet sous I'eclaireaient employe. De la nous d^duirons les principes suivants : En premier lieu, une impression complete, qu'elle soit forte ou qu'elle soil faible, n'a point de temps de Constance apparente appreciable; c'est4-dire que si, au moment ou une impression lumineuse forte ou faible atleint son maxi- mum d'intensite, la retine est subitement abandonn^e a elle-meme, I'impression commence ^ decroitre si vite, qu'on ne pent assigner aucun temps mesurable pendant lequel elle conserve sensiblement son intensity. En second lieu, consequemment, il n'y a que les im- pressions incompletes qui montrent un temps mesurable de Constance apparente, et ce temps est d'autant plus long que I'impression est plus loin d'etre complete. En troisieme lieu, quoique I'intensite de I'impression varie avec I'^clairement pour un m^me eclat relatif et avec racial relatif pour un meme eclairement, ces deux in- fluences agissent cependant d'une mani^re differenle sur le temps de Constance apparente, et ne peuvent etre assi- milees I'une k I'autre. Et d'abord, il serait inexact d'ad- mettre en general que le temps de Constance apparente est d'autant plus long que I'impression est plus faible, soit que le peu d'intensite de celle-ci provienne de la petitesse de racial relatif,soit qu'il r6sulte dela petitesse del'eclai- remenl; en effet, comme nous venous de le voir, quelque (32) faible que soil une impression par suite de la faiblesse de I'eclairement, si cette impression est complete, si, en d'autres termes, eile a atteint le maximum correspondant k reclairement employe, son temps de constaiice appa- renle est nul. D'autre part, dans les observations de men fils effeclu6es k la pieine lumi^re du jour (§ 15), en pas- sant de I'eclat relatif | h I'^clat relatif |, c'est-&-dire en r^duisant I'^clat relatif au quart de sa valeur, I'eclairement ne changeant pas, le temps de Constance apparente a ete sensiblement double, tandis que, dans rexp6rienc6 faite par le meme observateur h la lumiere de la lampe, I'eclairement variant de 1 a | pour un mfime eclat relatif, le temps de Constance apparente n'a augment^ que d'un seizieme. V^oici enfin une experience qui montre directement que le temps de Constance apparente ne depend pas d une maniSre immediate de I'inlensitc de I'impression. J'ai fait construire un disque contenant deux zones dans I'une desquelies les secteurs blancs etaient egaux aux noirs, tandis que, dans I'autre, les secteurs blancs n'avaient en largeur angulaire que le seizieme de la somme d'un blanc et d'un noir; mais, au lieu de laisser ces secteurs en blanc, on les a decoup^s k jour, et, apres avoir noirci completement les parties pleines du disque, on a coll^ sur la face post6rieure de celui-ci un disque de mdme gran- deur en papier mince. L'appareil place, le soir, devant une lampe, et mis en rotation rapide, fournissait ainsi deux zones grises d'eclats tres-differents; la plus sombre, celle qui contenait les secteurs blancs ^troits, etait la plus 6loi- gn6e du centre. On a applique alors derriere le systeme plusieurs autres disques en papier mince, mais d'un dia- m^tre tel qu'ils ne recouvraient que la zone la plus claire- (35 ) en modifianl le nombre de ces derniers disques, et choi- sissant, pour les former, des papiers de minceur conve- nable, on est arrive a rendre sensiblement ^gaux les eclats des deux zones. Dans ces conditions, mon gendre et mon fils onttrouv6 I'un et I'autre que les vilesses precis^- ment necessaires pour rendre les deux teintes uniformes ^taienl exacteraent les memes. L'^galit6 ainsi observee 6tait sans doute fortuite; mais il en r^sulte ^videmment que les deux temps de Constance apparente 6taient entre eux comme les largeurs angulaires respeclives des sec- teurs noirs, et il est visible que ces largeurs 6taient comme 15 ^ 8, la premiere appartenant k la zone a sec- teurs blancs etroits. Notre experience nous fournit done deux impressions de meme intensite ayant des temps de Constance apparente tr^s-diff^rents, et Ton voit que le plus long correspond a I'impression la plus incomplete, c'est-^-dire h celle qui est le plus en de?a de son maximum. Nous sommes done de nouveau amen6 au principe expose plus haut, savoir que c'est de I'etat plus ou moins incom- plet de I'impression, et non de I'intensit^ en elle-meme de celle-ci, que depend la longueur du temps de Constance apparente. Aussi I'influence, faible d'ailleurs, de I'^clairement de- pend-elle, selon moi, du meme principe encore. Dans son M^moire de 1868, M. Exner a montre, par ses ingenieuses experiences, que le temps necessaire k une impression pour alteindre son maximum est d'aulant plus long que cette impression est moins intense. Cela elant, concevons qu'on fasse tourner un disque partage en secteurs alterna- tivement blancs et noirs, avec la vitesse minima requise pour I'obtention d'une teinlegrise uniforme, et supposons que, sans changer cette vitesse, on diminue I'^clairement. 5 ( 3*- ) Sous le premier 6clairement, I'impression grise incom- plete, qui r^sultait d'une succession d'impressions par- tieiles incompletes aussi, avail un temps de Constance apparente (5gai k la dur^e du passage d'un secteur noir; sous le second eclairement, comme les impressions par- tielles ont moins d'intensiti et sont produitcs dans les m^mes intervailes de temps, elles sonl, d'apres la loi ci- dessus de M. Exner, plus ^loign^es de leur maximum que les premieres; en d'autres fermes, elles sont plus incom- pletes, et Ton admeltra sans peine que I'impression grise resultante est elle-meme plus incomplete; voil^ pourquoi son temps de Constance apparente est plus long. §18. On s'explique d'ailleurs ais^ment I'influence de r^tat plus ou moins incomplet de I'impression. Pendant qu'une impression se forme, la ratine reagit conlre Taction de la lumiere, et c'est cetle reaction, quelle qu'en soil la nature, qui fait que, sous I'excilation continue de la lu- miere, I'impression atteint un maximum, au del^ duquel elle s'afTaiblit graduellement; c'est encore cetle reaction qui, lorsque la lumiere cesse subitement d'agir, determine le d^croissement de I'impression persistante, et ram^ne progressivement I'organe au repos. Or si Taction de la lumiere cesse avant que I'impression ait atteint son maximum, on comprend que plus celle-ci sera, en ce moment, rapproch^e de son origine, moins la reaction de la ratine aura acquis d'intensit^, et, par suite, moins rapide sera le decroissement de I'impression persistante, en d'au- tres lermes, moins court sera le temps de Constance appa- rente. Aussi, lorsqu'on veut observer direclement, en fermanl et se couvrant les yeux, la persistance de I'im- pression, il faut, comme Ta fait remarquer M. Helmholtz, que la contemplation ail ^16 de tres-courte dur^e. (35) ' § \9. II me parait bien probable, d'apres tout cela, que le temps de Constance apparente ne depend nullement de Tin tensity en elle-meme de I'impression , et ne varie qu'avec I'^tat plus ou raoins incomplet de cette derni^re, de sorte que deux impressions I'une forte, I'autre faible, raais ayant atteint, au moment ot la lumiere cesse d'agir, la m^me fraction de leurs intensit^s maxima respectives, decroitraient identiquement de la meme maniere; c'est-a- dire que si Ton parvenait k reprfeenter chacun de ces d^croissements par une courbe en prenant pour abscisses les temps, et pour ordonnees les intensit^s succcssives de I'impression qui s'efface, les deux courbes seraient identi- quement les memes. Je suis done dispose k croire que j'ai commis une erreur dans ma Dissertation de 1829, en avan- ^antqu'une impression faible decroitpluslentementqu'une impression energique. J'etais arrive a cette conclusion d'apres I'analogie avec d'aulres phenomenes, et par une interpretation peul-^tre trop hative des experiences que i'avais failes sur les disques tournauts. Ce qu'il faudrail dire suivant mon opinion actuelle, c'est que le decroisse- ment initial d'une impression k I'instant oii la iumiere cesse d'agir, est d'autant moins rapide que rimpression elait plus eu deqk de son maximum, quelle que soitd'ail- leurs I'intensitede la lumiere qui I'avait produite. § 20. 11 est bien entendu que tout, ce que j'ai expose dans cette Note sur le temps de Constance apparente, con- cerne uniquement les impressions qui n'ont pas d^pass^ Icur maximum. Si la ratine n'est abandonn^e a elle-meme qu'au delude Tinstant de ce maximum, non-seulement le temps de Constance apparente demeure iusensible, mais I'impression s'efface plus rapidement, ce qui est encore un eflet de I'augmentation de la ri^action de I'organe; et si le ( 36 ) maximum a 6l6 de beaucoup d6pass6, le d^croissement de I'impression esl lellemenl rapide, qu'il n'est plus possible d'en saisir la trace; alors apparait, soil immediatement, soil apres un petit intervalle d'obscurite, I'image acciden- telle ou negative, qui, si I'objel contempl^ ^tait colore, offre la teinle oppos^e. II parait, d'apr^s cela, qu'il y a une inexactitude dans les figures qui accompagnent mon M^moire de 1834 (1), Memoire oil j'ai developp6 pour la premiere fois ma th^orie des couleurs accidenlelles de succession. Ces figures sont destinies k montrer par une courbe, avec des dimensions relatives arbitraires, la marche de rimpression qui s'efface lorsque, apres une contemplation prolongee, la retine est subitement abandonn^e k elle-meme. Dans les courbes ainsi trac^es, les abscisses sont les temps, et les ordonn^es sont les intensites successives de I'impression ; ces ordon- nees sont d'ailleurs positives ou negatives, suivant I'^tat (le I'impression. Pour figurer la petite persistance de rim- pression primitive apres la cessation de Taction de la lu- miere, j'ai dessin6 la courbe s'ecartant, k son origine, de I'axe des ordonnees, el tournant d'abord sa concavity vers I'axe des abscisses comme on le voit ici dans la llg. S, oil ah est Tordonn^e initiale, c'est-a-dire celle qui d6signe rintensil6 de I'impression au moment oil la lumiere cesse d'agir; or on doit conclure de ce que j'ai expose dans la Note actuelle, qu'il ne pent en 6tre ainsi, et que la courbe k sa naissance descend au contraire brusquement, de ma- niere que sa tangente se confonde avec I'axe des ordon- (1) Essai cCune iMorie ginirale comprenant Vensemble des appa- rencesis vuelles, etc. (M^m. de l'Acad. de Belgique, t. VIII). ( 37 ) nees, et que la courbe lourne sa convexite vers I'axe des abscisses (fig. 6). Fig.S. Fig. 6 Reportons-nous, en eflel, au cas d'une impression in- complete, cas dans lequel il y a, nous le savons, nn temps de Constance apparente mesurable. La perte eprouvee du- rant ce temps par I'impression, bien qu'insensible h i'ceii, est cependant reclle, et, dans la courbe de decroissement, le temps de Constance apparente serait mesur6 par la dis- tance entre I'ordonnee initiale et celle de la courbe apres la petite perte en question; mais, dans les conditions de nos figures, le temps de conslance apparente etanl inappre- ciable, la seconde ordonnee dont il s'agit doit coincider avec I'ordonnee initiale. § 21. Dans le premier des deux Memoires de M. Exner que j'ai cites, c'est-a-dire dans celui de 1868,rautenr pnr- vient & resoudre une question en apparence inabordablo, savoir la determination experimentale de la loi suivanl laquelle se developpe une sensation lumineuse depuis son origine jusqu'au moment oii elle atteint son maximum, et, prenanl pour abscisses les temps el pour ordonnees Ics (38) intensit^s success! ves de rimpression , il conslruil la courbe qui represente la generation de celle-ci. Quant a la loi suivant laquelle decroit I'impression quand I'organe est abandonn^ a Iui-m6me, les essais lentes jusqu'ici n'ont pas, je pense, reussi a la determiner. Dans son second Memoire, celui de 1870, M. Exner part de la courbe ci-dessus pour arriver k h construction d'une seconde courbe destinee h representer le d^croissenient de rimpression, en supposant que I'excitation objective cesse al'instantdu maximum d'intensitede cette impression; et cetle seconde courbe descend d'abord rapidement, puis de moins en moins vite, ce qui est conforme au r^sultat de i'observation directe (1). Mais, en ce qui concerne le trace de cette mSme courbe, M. Exner me parait confondre la sensation avec I'excitation objective, ou tout au moins les considerer comme proportionnelles I'une a I'autre; la courbe qu'il a trouvee pour la generation da I'impression est une courbe de sensation, et, afin d'en deduire celle du decroissement, il s'appuie sur les rapports de largeur qu'il faut donner aux secteurs blancs et noirs d'un disque tour- nant pour que les teintes grises uniformes correspondantes aientlesmemesdegr^s d'intensite lumineuse que les phases successives de I'impression qui se forme; or les inlensites de ces teintes grises sont des intensites d'excitation et non de sensation : si, par exemple,les secteurs noirs sontegaux aux secteurs blancs, I'intensile du gris resultant est,d'apres la loi de Talbot, la moitie de celle du blanc; mais la sen-r sation produite dans I'ceil par ce gris est bien superieure, (1) FicK. Ueber den zeitlichen Verlaufder Erregung in der Netzhaul (Archives de REicnERr et Du Bois-Reymond, annee 1863, p. 739; voir p, 757). (39) on le sail, k la moitie de celle que produit le hianc. Je ne pense done pas que la seconde courbe eonstruite par M. Exner figure reellemcnt la marche de I'impression qui s'efface. La courbe veritable serait sans doute analogue, mais s'ecarterait beaucoup, selon moi,de celle de M. Exner; peut-6tre pourrail-on la ddduire de cette derniere au moyen de la loi psycho-physique de M. Fechner. Plus r^cemment, M. Allard [i) a etudi^, a propos des phares, les effets resultant de la rotation plus ou moins rapide d'un sysleme de lentilles a eclats. Dans I'extrait public par les Comptes rendus, I'auteur s'exprime ainsi : « J'ai d'abord admis que, lorsqu'une source lumineuse agissant sur I'oeil disparaitsubitement, I'impression s'affai- blit avec une vilesse qui est, a chaque instant, proportion- nelle k la valeur de I'impression, conformement a la loi donnee par Newton pour le refroidissement. On deduit facilement de la la valeur de I'impression que I'oeil eprouve a chaque instant lorsqu'il est souniis a Taction d'une lumiere variable avec le temps; il suffil, en effet, de calcu- ler la valeur, a un moment determine, de chacune des impressions precedentes, eld'ajouler les resultats. On ob- tient ainsi des formules dont la discussion conduit aux memes consequences que I'observation des fails. J'ai cependant signale une difference, c'est que le feu fixe dont on a la sensation lorsque la vitesse est tres-grande, a, dans la pratique, une intensite un pen inferieure de 1 a 2 dixiemes a celles que donne la formule. Cela tient sans doute a ce que, pour etablir cette formule, on a tenu (1) Sur la transparence des flammes ei de Vatmosphere, et sur la visibilite des feux scintillanls (Comptes iieivdcs, )S7b, 1. LXXXI, p. 1096). ( 40 ) comple de loules les impressions, m^me decelles qui sonl deveniies Irop faibles pour produire isoMraent une sensa- tion, adrneltant ainsi que cea impressions, quoique insen- sibles par elles-memes, peuvent s'ajonter de maniere h devenir sensibles par leur somme. L'experience parail indiquer qu'il n'en est pas tout a fait ainsi, et si les resul- tats qu'elle donne pouvaient etre assez precis, il en r6sul- terait peut-etre un moyen de determiner, dans chaque cas, la dur^e pendant laquelle rimpression sur la retine reste sensible. » Ce passage, on le voit, n'est pas assez explicite pour qu'on puisse juger si les resultats de M. Allard sont, ou non, enlierement d'accord avec ceux que j'ai exposes dans cette Note. Toutefois ce m^me passage semble indiquer, contrairement a I'une de mes conclusions, que I'auteur considere ie d^croissement comme etant d'aulant plus ra- pide que I'impression engendree etait plus intense d'une maniere absoiue. Du reste, il a admis sa loi a priori, en s'appuyant, comme je I'avais fait moi-meme autrefois, sur une analogic suppos^e avec le refroidissemenl. § 22. Pr&entons une derniere remarque : I'impression uniforme determin^e dans j'oeii par un disque en rotation portant des secteurs alternativement blancs et noirs, est une impression incomplete, puisque la teinte uniforme est grise el nou blanche, quoique due au passage de secteurs blancs; mais eile ne pent se completer, parce qu'elle est periodiquement interrompue; elle offre done le caractere' singulier d'une impression incomplete qui demeure telle bien que Ton continue la contemplation. Cependant, a cause de la quasi-continuite d'une sem- blable impression, I'organe exerce bienl6t contre elle une reaction analogue ou idenlique h celle qu'il exercerait coBtre une impression absolument continue; c'est ce que montre I'experience suivante, que j'ai d6j^ exposee ail- leurs dans un autre but : si i'on remplace, sur le disque, les secteurs blancs par des secteurs colores que, pour fixer les id^es, nous supposerons rouges, et si, pendant que ce disque tourne, on le contemple assez longtemps, puis qu'on porte les yeux ailleurs, on per^oit nettement une image accidentelle verte. § 25. Terminons en citant deux experiences extreme- ment remarquables, I'une de M. Mach, I'autre de M. Exner. La premiere, celle de M. Mach (1), consiste a remplacer sur le disque les secteurs noirs par des figures noires lelles, que, lorsque le disque est en rotation rapide, la leinte grise varie en intensite en allant vers la circonfe- rence, mais de maniere que la loi de cette variation eprouve des changemenls brusques a certaines distances du centre. Fig. 7. Fig. 8. (1 ) Ueber die Wirkung der raUmlichen Vertheilung des Liohtreizes aufdie Netzhaut (Boiibt. de l'Acad. db ViBMBfE,186S, I. Lll , 2" partie, (42) Prenons comme exemple les disques representes ici (fig. 7 et8), qui donneiit evidemment lieu a de semblables ciiangemenls brusques. Lors de la rotation de celui de la fig. 7, on devrait s'attendre k ce que I'espace compris entre le centre et la circonference decrite par les pointes de I'espece a des figures noires demeural uniform^ment blanc, puis qu'a partir de cetle circonference l'6clat allat simple- menl en d^croissant d'une maniere continue jusqu'^ la cir- conference decrite par les pointes de I'espece b, et qu'enfin a partir de celte dernifere, I'eclat se bornat a decroitre plus rapidement, mais toujours d'une maniere continue, jus- qu'au bord du disque. Or on observe avec surprise, a la circonference correspondante aux pointes a, un anneau etroit plus lumineux que Tespace central, lequel , par con- traste, semble legerementgrisatre, et I'on observe dcmeme, a la circonference correspondante aux pointes 6, un anneau plus clair que les deux espaces gris qu'il separe. Dans le disque de la fig. 8 , qui oflfre en blanc ce que le premier offrait en uoir, les anneaux etroits qu'on distingue aux memes circonferences sent, au contraire, plus sombros que les zones environnantes. M. Mach montre que ccs efl'ets singuliers ne dependent pas des inlermiltences de Taction de la lumi^re, car il oblient les memes anneaux sur les images photographi- qucs des disques en question prises pendant la rotation de ceux-ci. 11 ne presente ces experiences que comme un moyen facile de mettre en evidence une loi gen^rale con- cernant les apparences subjectives produites par des sur- p. 503). — Ueber den physiologischen Effect raUmlich vertheilter Liclit- rme,2=, 3" el -i" Memoires (Ibid., 1866, t. LIV, 2« partie, pp. 131 et 393; et 1868, t. LVII, 2« panic, p, 11). ( 43 ) faces presentant certaines distributions d'eclat. Enfin il arrive ainsi k la consequence qu'ii y a une reaction mu- luelle entre les differents points de la retine, reaction d'autant plus energique que ces points sont plus rappro- ch6s. Rappelons que cette consequence est d'accord avec les idees que j'avais emises sur les phenomenes subjectifs selon I'espace, et qu'elle a ete plus tard pleinement con- firmee par les ing^nieuses experiences de M. Hering. La seconde des experiences auxquelles j'ai fait allusion plus haut, savoir celle de M. Exner (4), est la suivante : un disque partage en secteurs blancs et noirs tourne avec une vitesse mod6r(5e, de maniere qu'on y voie encore du papillotage; si, pendant qu'on le regarde, on se comprime graduellement les yeux, le papillotage s'efface et le disque se montre d'un gris uniforme, qui s'assombrit peu k peu. M. Exner parait faire dependre le phenomene de ce principe, que Taction de la lumiere epuise continuellement une substance photochimique n^cessaire a la fonclion visuelle, substance continuellement restituee aussi par un afflux du a la circulation. Dans ces id6es, en effet, avant la compression des yeux , I'afflux libre de la substance visuelle tendait k ramener la ratine k son etat normal pendant le passage de chaque secteur noir, et ainsi amoin- drissait rapidement la persistance de I'impression incom- plete engendree par le passage du secteur blanc precedent, mais la compression diminuant I'afflux dont il s'agit et amoindrissant ainsi la cause qui ramSne la ratine a son 6lat normal, I'impression persistante du secteur blanc d^croit d'une quantity trop petite pour que I'oeil puisse (1) Zur Kenntniss von der Regeneration in der Nelzhaut (Arcoives DE PFiiiGER , 1878, t. XVr, p. i07). ( U ) s'en apercevoir, et, par suite, la teinte grise lui semble uniforme. Ajoulons que M. Exrier appelle I'atlenliou siir le danger de ce genre d'experiences. RfiSUMfi. 1° Lorsqu'on essaie de mesurer la persistance d'une impression sur la reline par la methode de Segner et de D'Arcy, c'est-a-dire en faisant mouvoir circulairement I'objet qui produit I'impression , et d^duisant la duree de celie-ci de la duree d'une revolution, deux faits importanls sont a considerer : en premier lieu, I'impression que laisse I'objet apres son passage en un point de sa course, ne s'evanouit qu'apres avoir decru par degres, et le temps do ce decroissement fait partie de la duree tolaie de I'impres- sion ; cela exige que la vitesse de rotation soil assez mode- ree pour permettre a ce meme decroissement de se mani- fester tout entier entre les passages successifs de I'objel. En second lieu, si I'objet est ^troit, il n'engendre qu'une impression incomplete; on doit done lui donner une lar- geur angulaire assez grande pour que I'impression atteigno sensiblement son maximum d'intensite. Ces conditions entrainent des diflficultes que j'ai tacbe d'attenuer dans mes recherchesde 1829, et j'aitrouve alors, pour la duroe approximative de I'impression qu'un papier blanc bicn ^claire par la simple lumiere du jour d^terminait dans mcs ycux, la valeur 0",3S. 2° Si , ^ cause des diflScult^s en question , il faut renon- cer h obtenir une valeur exacte de la dur6e totale de I'im- pression dans des circonstances donn^es, il y a un autre element qu'on pent mesurer avcc precision; c'est le temps (4o ) pendant lequel, apres la disparilion de I'objet, I'impression conserve une valeur sensiblement constante, ou, plus exaclement, pendant lequel la perte qu'elle eprouve est trop petite pour etre perQue. Ce temps, que j'ai nomme le temps de Constance apparente de I'impression, s'^value ais6ment dans le cas de la rotation d'un disque partage en secteurs alternativement blancs et noirs : si le disque tourne avec la vitesse precise pour laquelle il commence k offrir une leinte uniforme, le temps dont il s'agit est evi- domment celui du passage d'un secteur noir en un meme point; seulement il se rapporte k une impression incom- plete, puisque le disque parait gris et non blanc, bien que I'impression qu'il produit soit due au passage de secteurs blancs. J'ai trouve, en 1829, que, pour I'impression in- complete engendrte dans mes yeux par un disque oil les secteurs blancs etaient 6gaux aux noirs, et sous I'^claire- ment de la simple lumiere du jour, le temps de Constance apparente ^tait de 0",0079. 3° Le temps de coostance apparente est soumis a une loi singuliere : si Ton emploie deux disques portant le m^me nombre de secteurs, mais tels que les secteurs blancs du premier soient egaux en largeur angulaire aux secteurs noirs du second, les temps de Constance appa- rente des deux impressions engendrees sont entre eux en raison inverse des 6clats des deux teintes grises qui d^terminent ces impressions. J'entends ici par I'eclat de la teinte grise uniforme que montre un disque tournant, I'intensit^ lumineuse de cetle teinte compar^e k celle du blanc. L'eclat ainsi defini a pour valeur, on le sait, d'apres la loi de Talbot, le rapport entre la largeur angu- laire d'un secteur blanc et la somme des largeurs d'un blanc et d'un noir. Ajoutons que, lorsque les deux disques ( 46 ) sont dans les conditions de notre loi, les Eclats des deux leinles grises sont compl^mentaires I'un de Tautre , c'esl- k-d'ite que leur somme reproduirait I'^clat du i)lanc; on s'en convaincra sans peine. La loi ci-dessus se v^rifie quel que soil le rapport des largeurs angulaires. 4° Que Ton construise une serie de disques portant tons le meme uombre de secteurs, mais tels que la largeur an- gulaire des secteurs Wanes aille en croissant de chaque disque au suivant, depuis une largeur tr^s-petite relative- ment a celle du secteur noir adjacent jusqu'^ une largeur qui ne laisse qu'un secteur noir tr^s-6troit; qu'on fasse lourner succcssivement chacun de ces disques avec la Vitesse requise pour la naissance de I'uniformit^ de teinte ; on aura ainsi une suite graduee de leintes grises, dues k des impressions incompletes mais approchant de plus en plus de se completer. L'^clat de chacune de ces teintes sera donne par la loi de Talbot, I'eclat du blanc 6tant pris pour unite; si done on determine le temps de Constance apparente de chacune de ces teintes, et qu'on range les valeurs ainsi trouvees en regard des valeurs correspon- danles de I'eclat, on pourra figurer par une courbe lamar- che relative de ces deux elements. En prenant pour abs- cisses les valeurs de I'eclat, et pour ordonntes les temps de Constance apparente correspondants , on obtient une courbe qui presente un point d'inflexion pour I'eclat |, parait converger, pour un ^clat nul, vers une asymptote perpendiculaire h I'axe des abscisses, et converge, pour I'eclat complet, vers une ordonnee nulle. Lorsqu'on effeclue ces determinations d'abord k la pleine lumiere du jour, puis k une lumiere tres-faible, les deux courbes sont analogues, et la seconde, commela premiere, (47 ) conveig,e vers une ordonn^e nulle pour le cas de I'^clat complet. 5° [I r^sulle de 1^ : en premier lieu, qu'une impression complete, qu'elle soil intense on faible, n'a jamais de temps de Constance apparente appreciable, et qu'ainsi ce temps existe uniquement pour les impressions incompletes ; en second lieu, qu'il est d'autant plus long que I'impression est plus incomplete, c'est-^-dire plus en de?a de son maximum. 6° Le degr6 d'^clairement auquel est soumis I'objet qui produit I'impression, a une influence sur le temps de con- stance apparente; mais cette influence est pen conside- rable : pour doubler k pen pres, toutes choses ^gales d'ail- leurs, le temps en question, il faut, par exemple, si Ton part de la lumiere d'un jour serein, abaisser I'eclairement jusqu'a la lueur que donne la pleine lune. Cette petite in- fluence, du reste, parait n'etre qu'indirecte. 7* Mes experiences conduisent h la conclusion probable que toutes les impressions incompletes qui, au moment oii la lumiere cesse d'agir, ont atteint la meme fraction de leur intensite maxima, quel que soil le degr6 d'^clairemenl de I'objet, decroissent idenliquement de la meme maniere, c'est-a-dire que la courbe qui representerait ce decroisse- ment, serait la m6me pour toutes.